27 févr. 2018



HAÏKU   Partie LXXVIII

°°°°°°°°°

penché sur la margelle
prise au piège
la lune dans le puits

tous les nuages du monde
n'empêche pas
la pleine lune

entre nuit et journée
difficile de choisir
lune ou l'autre

trop pudique
la lune n'ose nous montrer
sa lune

pleine lune
sortant de son bain
trempée de lumière


22 févr. 2018




HAÏKU   Partie LXXVII

°°°°°°°°°

à l’affût
dans les hautes herbes
les oreilles du chat

soir d'été
concile de chats
autour des poubelles

sur le toit d'une cabane de jardin
épiant le monde
maître chat

ce soir
lune et chat
en virgule

mésange perchée
narguant le chat -
round d'observation

17 févr. 2018

" Maman a tort "   de   Michel Bussi   7/20

      Quand un beau jour, Malone, du haut de ses trois ans affirme d'un ton péremptoire que sa maman n'est pas sa vraie maman, Vasile, un psychologue scolaire, le croit. Seulement il est le seul, et s'il veut débusquer la vérité cachée, il doit prendre les choses en main avant de voir les souvenirs de Malone se perdre dans les limbes des premiers âges. Vasile prend donc contact avec la commandante Marianne Augresse, policière au commissariat du Havre...

      Le spitch à l'air alléchant, il l'est, reste encore à traduire cet incipit en passionnant roman. Car je ne vais pas y aller par quatre chemins : je me suis profondément ennuyé. J'avais tant aimé Nymphéas noirs, que je place comme son meilleur roman, mais là franchement, ces plus de 500 pages m'ont fait l'effet de la traversée du désert ! Longue, aride ! Mais pourquoi donc ?
      D'abord par le ridicule de certains noms : Monsieur Dragonman, Madame Augresse, Monsieur Pasdeloup...etc. Oui bien sûr c'est une référence aux contes et légendes, mais quand même...
      Puis par la lenteur de progression de l'intrigue, que de pages pour rien, du blablabla et encore du rallonge-sauce ! Au point d'appliquer la lecture en zigzag pour écourter ma souffrance. Au risque de manquer un point essentiel ? Rassurez-vous, je ne risque rien tant ils sont rares, et uniquement concentrés dans les dialogues, donc aisément repérables.
      Ensuite par les invraisemblances comme celle-ci : dans le doudou de Malone, se trouve un appareillage qui lui permet d'entendre la voix de sa vraie mère. Mais son doudou n'est-il donc jamais lavé ? D'autant qu'il le trimbale partout, et puis sa mère, rien qu'à la palpation, ne se rend-elle jamais compte qu'un truc dur est niché au coeur de la peluche ? Allons allons, je veux bien me faire abuser, mais là, c'est un peu abracadabrantesque, comme le disait notre bon vieux Jacquot !
      Enfin, la qualité de l'écriture pêche par un manque de texture, de consistance. J'aime quand il y a de la mâche avec un soupçon d'emphase générant du plaisir. Allant jusqu'à relire une phrase parfaitement écrite. Mais là, sur ma faim, je suis resté ! Il faut dire que mes dernières lectures étant plus "littéraires", il y a avec ce polar, comme un trou d'air, me faisant rapidement reprendre contact avec le sol !
      En conclusion, ce roman est si léger et si diaphane, qu'une semaine après sa lecture, il reste juste en mémoire quelques volutes de fumée qui ne s'éterniseront pas. 

     Néanmoins, j'ai été séduit par la toute fin, avec son côté rébellion contre un système froid et sans conscience, mais cette parenthèse enchantée est trop courte pour changer d'avis. Et puis,  si sous la forme d'un livre cette histoire est franchement décevante, cela pourrait faire un meilleur téléfilm, d'ailleurs France 2 vient d'en boucler le tournage, comme quoi il n'y a pas de hasard ! 

      Non, sérieusement je peux comprendre que certaines personnes aient juste besoin de se vider la tête, là honnêtement, je n'ai rien contre, mais moi au contraire, j'ai un besoin viscéral et instinctif de me la remplir cette foutue tête, alors avec cette nourriture quasi insipide... !

      

12 févr. 2018



HAÏKU   Partie LXXVI

°°°°°°°°°

sur le chemin
seules les montagnes
écoutent le pèlerin

ces nuages blancs
infiniment
plus grands que moi

longue marche
seul au milieu de rien
le pèlerin oublie le monde

le pèlerin cherche
l'unique, le divin
et trouve autre chose

ballade silencieuse
 parmi de vieilles pierres
elles ont tant à dire



8 févr. 2018



" La femme gelée "   de Annie Ernaux   17/20


      Avant toutes choses, peut-être dois-je préciser que comme le définit la société, je fais partie de la gente masculine, cela à son importance je crois.

      Ce roman, très féminin d'Annie Ernaux, oriente la narration sur les femmes de son enfance. D'abord, sa mère qui tient une épicerie, mais aussi ses tantes et sa grand-mère, toutes des femmes fortes, des bosseuses, peu regardantes de leur apparence et négligeant volontiers l'entretien de leur maison, sauf en de grandes occasions. Par contre, son père ne rechigne pas à cuisiner et à faire la vaisselle. Par la suite, en grandissant et en côtoyant d'autres copines du même âge, elle s'étonne de découvrir un autre modèle maternel : les mères de ses amies s'habillent avec goût, comme de "vraies" femmes, elles cuisinent et se chargent d'avoir une maison irréprochable, sans la moindre parcelle de poussière. Petit à petit, elle va prendre conscience que sa famille fait vraiment figure d'exception.

      A travers ce roman transpire, à toutes les pages, le problème encore aujourd'hui irrésolu de l'égalité entre hommes et femmes. Les lucides parents d'Annie Ernaux sont bien conscients que pour acquérir une certaine liberté de vie, leur fille doit absolument faire des études, de façon à s'émanciper de sa condition modeste, puis, de cette abominable domination masculine. Avant de saisir toute la portée de ce message, leur jeune fille tombe dans le piège facile et phallocratique des amours de jeunesse. D'abord avec ce désir marcescible de séduire les garçons, puis, malgré l'obtention du CAPES, de vite se marier, d'enfanter une fois, puis deux. Dès lors, elle comprend trop tard qu'elle vient elle-même d'endiguer sa vie, de brider son appétit intellectuel et de museler sa liberté chérie pour un bon moment.

      Avec son écriture rebelle, imagée, sèche et saccadée, Annie Ernaux déverse toute sa haine de notre société patriarcale, avec son sempiternel refrain sanctuarisé : mariage, bébé, couches, ménage, courses, cuisine et re-bébé et re-couches, jusqu'à que le sentiment de liberté s’évanouisse pour longtemps, tel un sacrifice odieux sur l'autel de la lourde tradition machiste.
      Par dérision, la comparaison homme/femme se traduit sous sa plume, surtout en fin de roman, par une sorte d'humour noir, comme un exutoire afin d'exprimer une once de résistance, peut-être pour ne pas devenir folle.

      Texte relativement ancien (écrit en 1983 mais relatant les années 50/60), pourtant d'une actualité toujours brûlante, sera-t-elle démodée un jour ? A l'aune des obscurantismes qui se lèvent  partout dans le monde, quand la femme héritera-t-elle du même statut que l'homme, quand arrivera-t-elle à s'affranchir mondialement de cette gangue patriarcale pour s'élever au même niveau que l'homme, et pour ensuite, fondamentalement, devenir son avenir ? Honnêtement, elle le mérite.

        Dans une société sans complaisance, inlassablement, Annie Ernaux trace son sillon avec le regard acéré d'une sociologue, et, comme tout bon roman universel, elle nous fait réfléchir à nous-mêmes, à nos choix, à nos renoncements, et pourquoi pas ? A d'envisageables audaces !    

2 févr. 2018







HAÏKU   Partie LXXV

°°°°°°°°°

entre deux rideaux de falaise
le chant de la mer
- théâtre d'Etretat

gribouillage blanc gris
mâchonné par les nuages
éternelle mouette

deux éléphants se désaltèrent
de mer et de poissons
- l'Etretat de Maupassant

ciel de peintre
toile bleue et argentée
camaïeu d'Etretat

nuit sur Etretat
juste un trait blanc
ses falaises