1 déc. 2020


 " Juste avant l'oubli "   d'Alice Zeniter   10/20


      Aux Hébrides, bousculé par les vagues et le vent, il existe un bout de terre méconnu nommé Mirhalay. Seuls les moutons s'y plaisent. Autrefois, des hommes ont essayé de s'installer sur cette île inhospitalière, mais ont finalement dû renoncer.

      Pourtant, suite à son divorce en 1963, l'écrivain écossais Galwin Donnell, un type misogyne et misanthrope, décide de tenter l'expérience d'une installation. Cela durera 22 ans avant la survenue d'un drame bien mystérieux en 1985. Suicide, accident ou meurtre ? Cette disparition bâtit la légende de Galwin Donnel, dont ses romans donnèrent lieu à d'innombrables analyses. Ainsi, tous les 3 ans, sont organisées des "Journées d'études internationales" sur l'oeuvre de l'écrivain. Viennent y débattre une poignée d'intellectuels, férus de polar, ayant chacun un avis bien tranché sur l'oeuvre et le maître.

      Cet été-là, Emilie, qui travaille une thèse sur l'écrivain mythique, est chargée d'organiser ce rendez-vous. Son compagnon depuis 8 ans, Franck, un jeune infirmier, doit la rejoindre dans quelques jours. Au fond de lui, il espère que ce séjour lui donnera l'occasion de sceller définitivement son union avec Emilie et pourquoi pas de concevoir leur premier  enfant.

      Le vrai tour de force d'Alice Zeniter est de rendre crédible et de mettre en abîme le statut de l'auteur de polar Gawin Donnel. A coup de citations, en exergue des chapitres, à coup d'extraits de critiques de journaux, en bas de page, et même grâce à des bribes d'articles de Wikipédia, elle crée l'existence du célèbre écrivain écossais. Un rien candide, en début de lecture j'ai voulu vérifier la véracité de l'existence de Gawin Donnel, naturellement, je n'ai rien trouvé. En tout cas, la supercherie est parfaitement menée. Chapeau bas chère Alice !

      Sillonnant sans cesse le roman, les thèmes abondent, entremêlant à la fois, relation amoureuse perturbée, mystère autour de disparition de Galwin Donnel, vie dans des conditions extrêmes et colloques universitaires. L'ensemble, quoi que relativement court, est mijoté longuement, puis le goût en est relevé pour tenter d'être digne de la littérature noire.

      Malgré tous ces ingrédients, la recette m'a déçu. En effet, en dépit de toute mon implication, je suis resté en dehors du récit. Je n'ai jamais réussi à me passionner pour cette histoire dont on peut aisément deviner la fin. La soi-disante ambiance de polar tombe vite à la mer ! Les chapitres des colloques m'ont ennuyé au point de sauter quelques paragraphes, rassurez-vous, cela ne change rien à l'histoire... malheureusement prévisible. Il manque peut-être une sorte de folie ou d'extravagance pour bousculer le ronronnement du déroulement de la narration. C'est comme-ci l'eau de mer avait délavé un tableau, à l'origine, criant de couleurs.

      Nonobstant cet avis défavorable, je dois reconnaître, à la décharge d'Alice Zeniter qu'elle possède une belle plume, que certains passages sont admirablement écrits, tels : la description de l'île, l'incompréhension d'Emilie devant l'amour absolu de Franck et sa vision cynique sur la nécessité de vivre en couple. Malheureusement ces portions congrues ne peuvent sauver un récit qui prend l'eau de partout et qui ne demande qu'à sombrer... juste dans l'oubli (pardonnez le jeu de mot facile).


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