23 nov. 2016


" Mourir sur Seine "   Michel Bussi   14/20


Juillet 2008 à Rouen, l'heure de l'Armada a sonné. Une fois de plus, une multitude de voiliers venus de tous horizons viennent s'aligner le long des quais de la ville aux cent clochers. Au sixième jour, un marin de l'équipage mexicain du célèbre Cuauhtémoc est retrouvé poignardé sur les quais. Puis d'autres marins goûteront aussi au redoutable poignard du mystérieux tueur.

L'enquête menée par le commissaire Paturel, un homme divorcé dont c'est le mois de garde de ses deux enfants, devra jonglé entre son enquête et son rôle de père. Il devra aussi faire rapidement preuve d'efficacité professionnelle pour éviter une hémorragie de touristes due aux assassinats. Débute alors une course effrénée contre la montre, d'autant que cette manifestation avec ses 8 millions de visiteurs se place en deuxième rang juste après le Tour de France, de gros enjeux sont en jeux (si vous me permettez cette répétition).

Maline Abruzze, l'une des principales protagonistes, est journaliste au Seinomarin, l'un des hebdomadaires de la région. Ses talents de fouineuse hors pair vont l'amener au plus près du danger ; toujours prête à payer de sa personne, notamment auprès de l’apollon : le bel Olivier Levasseur, responsable des relations avec la presse pour l'Armada.

Outre l'intrigue principale, le roman effleure en toile de fond le monde des pirates et des trésors ramenés des Amériques par les premiers explorateurs. Ces récits picaresques de la piraterie sont rapportés par le charismatique Ramphastos, un ancien conteur et pirate anarchique (pléonasme), ivrogne à ses moments perdus et Dieu sait qu'il en a beaucoup ! Cependant, petit bémol, les liaisons entre ce passé sensé ensemencer le présent sont-elles véritablement à la hauteur des espérances suscitées ?

Les réjouissances de ce polar sont ailleurs, d'abord dans le rythme : des phrases simples et courtes, prompts chapitres également, aucun temps mort, difficile de ne pas avaler les pages avec une gourmandise gargantuesque pour vite en savoir plus. On est exactement dans ce que les anglo-saxons appellent un page-turner. Et pour mon cas, ces 470 pages furent dévorées en quelques heures, comme il se doit !

Deuxième point positif : Michel Bussi sait utiliser l'Histoire de la navigation en Seine et ses naufrages pour pimenter la trame du récit. Les lieux originaux sont également à l'honneur, tels : les rues médiévales de Rouen, notamment cette danse macabre sculptée sur les piliers de l'aître Saint Maclou, la chapelle bleue de Caudebec-en-Caux, le cimetière de Villequier et les vitraux de son église, le marais Vernier, le pont Flaubert, etc... deviennent sous la plume de l'auteur des sites à visiter lors de nos prochaines vadrouilles hautes normandes.

Enfin, dernière réussite, son côté ludique. Ce roman est un jeu où chaque lecteur s'engouffre avec volupté, dans la brèche consistant à se muer en Sherlock Holmes, afin de démasquer le véritable meurtrier. Malheureusement, dans ce livre, Michel Bussi développe avec une telle dextérité l'art de nous mener en bateau, si je puis dire, que c'est avec stupeur et consternation que l'on découvrira le nom de l'assassin. D'ailleurs en parcourant la fin du roman, et si on possède l'art de lire entre les lignes, on ressentira l'auteur piaffer de joie de nous avoir berné, que dis-je, manipulé, escroqué ! Ses fausses pistes sont comme des chausse-trappes où plus d'un lecteur est condamné à chuter ! Mais n'est-ce pas ce que l'on demande à un polar avant tout ?

Certains titres des chapitres relèvent de jeux de mots plus ou moins heureux, à l'instar du titre du roman Mourir sur Seine, grosse référence à Dalida, mais que les jeunes qualifieront d'humour de vieux, encore faut-il qu'ils connaissent l'artiste !

Michel Bussi nous offre dans le même paquet deux ou trois considérations sur la ville de Rouen, telles des paradoxes qui la paralysent et la pénalisent face aux défis du futur.

Pour conclure, Michel Bussi écrit un bon thriller populaire français, assumant son lot de rebondissements et de révélations, où un lectorat pas trop exigeant passera un agréable et jouissif moment de détente. Finie la dernière page, il souffle comme une invitation à venir flâner dans la région rouennaise. Cependant, certains personnages manquent d'épaisseur et de relief. Les brefs récits historiques trop succincts auraient mérité un développement plus étoffé. Mais bien sûr, cela aurait nui au rythme échevelé, et puis, on n'est pas là pour ça, me direz-vous ! Et vous aurez bien raison !

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