Fin des années 80 en Algérie, Nafa Walid est un jeune algérois vivant à Bab-El-Oued dans la casbah. Malgré son origine modeste, il se rêve en acteur de renommée internationale, d'ailleurs un metteur en scène l'engage sur son long métrage, mais depuis... plus rien. Pour patienter, il devient le chauffeur d'une très riche famille d'Alger, l'occasion pour lui de découvrir un monde au-delà de toute rationalité, où les lois de l'état ne s'appliquent pas. Il en fera la cruelle expérience, terrorisé pas ce qu'il a vu, il finira par démissionner. Mais le traumatisme est si profond qu'il va le broyer peu à peu. Dès lors, comme l'enclenchement d'un mécanisme diabolique, il glissera inexorablement sur la pente de l’innommable.
Parce qu'une graine saine s'est vue humiliée par des hommes immoraux et corrompus, lui ayant fait perdre le respect d'elle même.
Parce que cette graine désormais altérée et vulnérable, s'est vue revalorisée fallacieusement par des recruteurs islamistes.
Parce qu'avec l'ébranlement psychologique dans laquelle elle est tombée, cette graine déroutée finit par se mettre à dos sa famille, brouillant ses repères.
Parce qu'en ces années 80/90, une guerre civile née d'un état corruptible, vénal, immoral et inique, opposant les militaires à des bandes armées islamistes dans une série d'exactions sans fin.
Parce que tout cela, plus des circonstances particulières, cette graine qui ne demandait qu'à pousser normalement s'est muée en un abominable monstre froid, comme tant d'autres jeunes gens rendus vulnérables par les contorsions d'un état et l'obscurantisme des fanatiques religieux.
Comme toujours, Yasmina Khadra nous propose une histoire déroutante, écrite avec une efficacité absolue. Ses protagonistes sont criants d’authenticité. A son habitude, le style est maîtrisé, l'écriture ciselée, un vrai travail d'artisan de haut niveau. D'ailleurs tous ces romans sont d'un maintien remarquable, aucun déchet dans sa production, aucun compromis ou facilité dans ses écrits. Peut-être pour lui, dans les années à venir, un prix Nobel de littérature pour couronner sa carrière ? A mes yeux, cela ne serait nullement volé. Longue vie à cet homme, et qu'il nous enchante encore longtemps avec son excellente écriture.
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