28 avr. 2017



" La ville dont la cape est rouge "   de Asli Erdogan   13/20

      Özgür, une étudiante stambouliote, part vivre un temps à Rio de Janeiro, histoire de changer d'air, de vivre une expérience enrichissante en découvrant le côté sombre de l'humanité. Elle ne sera pas déçue, vite confrontée à la pauvreté, à la violence et aux meurtres. 
      Cette ville en déliquescence l'attire irrémédiablement, liquéfiant sa propre personnalité, annihilant sa volonté, anesthésiant ses envies, ses désirs. Vite Özgür repousse, puis oublie la peur. Le vertige des dangers innombrables la fascine. Elle élude la mort, puis l'apprivoise dans une danse macabre au bord du vide.
      Malgré tout, Rio, cette ville sublime et meurtrière, ensorceleuse et corrompue, aux parfums exotiques et aux pléthores d'affamés, lui permettra d'écrire le livre de sa vie.

      Asli Erdogan, originaire de Turquie, a vécu deux ans à Rio, elle s'est imprégnée comme une éponge de toute la face cachée de la vile ville aux nombreux bidonvilles, pour nous le restituer sans le moindre filtre. Rien ne nous sera épargné, aucune édulcoration, que des larmes et du sang, la vraie face de l'homme.
     Ce livre, ce brûlot, à faire lire à toutes ces hordes de touristes qui ne voient que ce qu'ils veulent voir, se vit comme un reportage, un documentaire. D'ailleurs on sent, derrière la plume sans pitié d'Asli Erdogan, sa formation journalistique, elle choisit adroitement ses mots, ses comparaisons, les presse pour les vider de toute leur essence pour faire sens. D'où ce sentiment de justesse, de vérité, sans défaillir, nous entraînant par empathie dans ce bal d'un monde sans Dieu et sans loi. Un comble quand la figure inévitable du Corcovado plane au dessus de la ville. Impuissant devant l’inhumanité de l'humain. Un géant si inutile. Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? Psaume 22.

      Ce récit à tout pour enthousiasmer, le sujet, l'écriture, seulement il pêche par un fouillis forcément volontaire, mais dommageable à la lecture. Il n'y a pas de linéarité, on ne va pas d'un point A au point B, le flash-back est roi, et cela gêne à une adhésion optimale.
      Une utilisation excessive de l'adverbe "comme" m'interroge, est-ce voulu ou pas ? 

      Dans ce roman s'assimilant à un coup de gueule, Asli Erdigan maîtrise son terrible sujet, dans une atmosphère étouffante et moite tant sur le plan climatologique que sociétal sans défaillir, au service d'un ressenti à la limite de l'accident psychologique. Une écrivaine forte, sans l'ombre d'un doute, dont il me faudra lire d'autres romans pour me faire un avis plus fondé.


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