Vers le milieu du XIXème siècle dans l'Ohio, Sethe, une jeune femme noire vit avec sa belle mère, Baby Suggs, ses deux fils, Howard et Buglar, et sa fille Denver. La maison qu'ils habitent est hantée par le fantôme d'une petite fille : les meubles dansent, les miroirs se brisent, les biscuits secs s'écrasent contre les portes et des pâtisseries sortent du four avec l'empreinte de deux petites mains. Épouvantés, ses deux garçons finissent, un beau jour, par s'enfuir.
Le retour de Paul D, un ancien esclave qui vivait dans la même plantation qu'elle, bouleverse Sethe, elle revit alors son passé si douloureux de femme esclave. Puis un jour, Beloved, arrivant de nulle part, surgit dans la vie de Sethe. Qui est cette belle jeune fille, qui semble éteinte de l'intérieur ?
Surtout, si vous voulez vivre ce livre à fond, ne lisez pas la quatrième de couverture qui annonce trop vite la teneur réelle de la tragédie qui a eu lieu.
Le roman se déroule comme une spirale infernale, où des fragments de la vie de Sethe remontent des limbes du passé, à l'instar de ses frères humiliés, moins considérés que du bétail, souvent battus, parfois massacrés, si ce n'est carrément pendus. Sethe se remémore toutes les ignominies dont sont capables les hommes blancs, quand aucune loi n'est là pour stopper leurs actes purement racistes. Toni Morrison dénonce froidement ces injustices innommables d'hier, mais ont-elles vraiment toutes disparues aujourd'hui ?
Certes, il y a le plus souvent, une certaine qualité d'écriture, mais parfois, je me suis perdu, noyé, submergé par des vagues de mots décrivant des situations qui sortaient de je ne sais où ! Cette lecture m'a posé d'énormes problèmes de compréhension basique. En effet, aucun ordre linéaire du récit n'est respecté : les époques se mélangent allègrement, sans la moindre indication. Les parties narratives sont troquées de tous éléments positionnant clairement les protagonistes de l'histoire. Dès lors il convient au lecteur de se reconstituer lui-même le fil du drame avec un manque singulier de facteurs et de paramètres. J'ai passé mon temps à courir après le chaînon manquant, sans jamais vraiment mettre la main dessus, ou alors je n'avais que de minces fragments dans la main, non emboîtables les uns dans les autres. Des bouts bien insignifiant de vérité, ridicules face à la gravité du récit. Comme si je m'adonnais au plaisir, tout illusoire, d'assembler un puzzle représentant un tableau de Jackson Pollock ! Le célèbre peintre américain de l'impressionnisme abstrait. Quel gâchis, quel dommage de voir cette tragique histoire du peuple noir, si bouleversante, si poignante d'horreur et de folie humaine, noyée sous des monceaux de phrases alambiquées, du genre : Hors de ma vue monsieur, loin, loué soit Son Nom, du patron des coqs ravis, Paul D se mit à trembler. Ou encore : Le dernier des hommes du Bon Abri, nommé et désigné comme tel par quelqu'un qui était censé savoir, y croyait. Les quatre autres y avaient cru aussi, dans le temps, mais ils avaient disparu. Celui qui s'était perdu, avait jamais été retrouvé. Naturellement, avec un tel discours difficile de savoir qui est qui ! Allez-vous débrouiller avec ça ! Est-ce due à la traduction ? A un manque flagrant de culture de ma part ? A l'état lamentable de mes facultés cognitives ? Ou à la volonté intime de Toni Morrison d'écrire de manière sibylline, presque abstraite pour ne pas dire fumeuse ? Je ne sais. D'autant que Toni Morrison s'est vue décernée le Nobel de littérature en 1993, et que ce roman a obtenu le prix Pulitzer en 1988 !
Franchement, j'ai failli stopper ma lecture plus d'une fois, perdu au fin fond de nulle part, mais à cause du Pulitzer, je me suis dit : cela doit bien finir par prendre forme à un moment ou un autre... mais non, décidément pas ! Et cela sur presque 400 pages !
Quelle ampleur ce roman aurait-il pu atteindre si sa narration n'était pas si tarabiscotée ? Quelle puissance supplémentaire aurait-il pu développée si sa sophistication extrême avait eu plus de retenue ? Grand dommage.
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