27 nov. 2020




" L'année du lion "   de Deon Meyer   18/20


      Oeuvre dystopique, tout à la fois haletante mais terriblement actuelle.

      Un virus foudroyant a décimé les neuf dixièmes de l'humanité. En Afrique du sud, sous l'égide d'un humaniste nommé Willem Storm, une nouvelle communauté se forme, humble, autonome et bientôt prospère. Rapidement, elle attire la convoitise de tout ceux qui n'aspire qu'à profiter, par la violence, du bien d'autrui.

      Tout le roman est porté par la voix du fils de Willem Storm : Nico. Celui-ci, âgé maintenant de 47 ans, âge où son père fut assassiné, décide de nous raconter l'histoire de sa vie à partir de ses 13 ans, de nous dire aussi pourquoi il a bêtement gâché les derniers mois partagés avec son père.

      A noter avant toute chose, que ce roman fut écrit en 2017, donc bien avant notre histoire de coronavirus nommé Covid-19. Nous sommes donc loin d'un livre opportuniste qui jonglerait sur notre pandémie actuelle.

      D'emblée, ce roman vous accroche, vous accapare. D'abord par son atmosphère post-apocalyptique, puis par sa force narrative, et enfin, par la charge émotionnelle qu'il distille tout du long. De surcroît, l'influence néfaste de l'Homme sur l'état de la planète et des solutions qui en découlent est un sujet brûlant d'actualité. Et Deon Meyer, poussant sa réflexion sans retenue, nous livre une vision épouvantablement extrême de ce qui pourrait advenir... demain.

      Naturellement, impossible de ne pas rapprocher ce récit de la série The walking dead, dans les deux cas, une petite communauté lutte au jour le jour pour la survie de l'espèce. Mais ici, pas de zombies à la pelle, non, juste les reliquats d'une humanité avec plus ou moins d'humanité. Donc, d'autant plus réelle, d'autant plus proche de nous, que chacun peut s'y identifier, s'y reconnaître.

      Outre le fait que Deon Meyer possède le don de malmener son lectorat grâce à un suspens continu et parfois insoutenable, il détient aussi le talent fou d'agiter les réflexions sur nos préoccupations les plus immédiates et les plus vitales. Sans vergogne et sans préambule, il met les mains dans le cambouis de notre prétendu altruisme naturel. En effet, devant l'indifférence quasi-totale de l'humanité face au processus de destruction qui est en train de rendre la Terre inhabitable, Deon Meyer jette son pavé dans la mare : Que faire devant la détérioration criante du climat ? Que faire face à une pollution de l'air, de la terre et de l'eau ? Que faire face à une pauvreté endémique et un capitalisme immodéré ? Que faire face aux religions qui voient dans tout cataclysme le geste punitif de Dieu ?  Que faire pour que demain nos enfants et petits-enfants ne soient pas condamnés non pas à vivre, mais à survivre sur une planète devenue délétère des conséquences d'une indifférence généralisée ?

      De surcroît, Deon Meyer enfonce le clou en ne voyant derrière le caractère violent et individualiste de l'Homme qu'un animal sauvage, prêt à tout pour sa survie propre, peu importe l'autre. Quel piètre considération pour nos semblables ! Cependant, le portrait dressé est si fidèle à la réalité que nous appréhendons, chaque jour, qu'il laisse peu de place pour l'espoir. Alors, dans un élan extrême de pessimisme généreux, je vous souhaite à tous, une bonne fin du monde !!!

      Un seul bémol : la qualité littéraire du roman qui aurait mérité un autre traitement. Cependant, cela peut se justifier par le fait qu'il ne s'agit, après tout, que du récit de Nico Storm, soit d'un homme qui raconte ce que fut sa vie dans un monde en recomposition, alors le style, cela peut bien attendre.

      Dans notre monde où surconsommation rime avec égoïsme outrancier, lire ce roman amène inexorablement une réflexion sur le monde que nous voulons pour demain. Oeuvre salutaire, remarquable et bigrement captivante.


20 nov. 2020

Dominion - C. J. Sansom - Babelio

 " Dominion "   de C.J. Sansom   12/20


      Et si le Royaume-Uni avait pactisé avec le diable !

      En partant de l'hypothèse, pas si absurde que cela, que le 10 mai 1940, suite à la démission de Neville Chamberlain du poste de premier ministre, ce ne fut pas Winston Churchill qui le remplaça, mais Lord Halifax, un homme plus conciliant avec les nazis, et qui, voyant les pays européens ployer très rapidement sous la botte allemande, chercha un compromis avec Hitler. Cependant, même si Moscou est pris et que Staline a été pendu, l'armée allemande patauge toujours face à l'armée rouge, dans les interminables grands espaces de l'URSS. De l'autre côté du monde, l'armée japonaise piétine tellement en Chine qu'elle n'a pas le désir de venir titiller les américains à Pearl-Harbour. Ceux-ci n'entrant pas en guerre, du moins pas officiellement, la seconde guerre mondiale ne peut plus avoir lieu.

      Hiver 1952, le Royaume-Uni est devenu un satellite de l'axe nazi. Depuis 12 ans, la résistance attend un signe de Winston Churchill pour embraser le pays. Parmi ces hommes : David Fitzgerald, un fonctionnaire d'origine juive se voit confier la périlleuse mission de venir en aide à un scientifique porteur d'un secret capable de mettre un terme à l'hégémonie nazie. Cependant, informée par ses espions, la Gestapo met tout en oeuvre pour mettre la main sur cet homme de science.

      Comme toute uchronie, il est fascinant de voir tout ce qu'un simple changement de données de base peut engendrer comme conséquences. Ainsi les rôles sont redéfinis et les ennemis dans un monde peuvent devenir neutres dans l'autre. Cette réflexion sur une variante autour de la seconde guerre mondiale, de nombreux autres se la sont posée à leur tour, notamment Philip K Dick dans Le maître du haut château et Philip Roth dans Le complot contre l'Amérique.

      Le point le plus fort du roman, celui qui fait tout l’intérêt et peut-être l'unique intérêt de ce livre, est tout le soin apporté par l'auteur à la vraisemblance des faits, pourtant inventés. En effet, toutes ces pages sur la géopolitique mondiale, sur la doctrine nazie, sur la propagande, sur la presse censurée, sur la colère du peuple britannique contre les attaques de la résistance, sur ceux qui veulent à n'importe quel prix rester pacifistes, ou ceux qui s'identifient sans nuance à un nationalisme exacerbé, sans oublier, à la mort d'Hitler, la guerre de succession entre l'armée allemande et les SS, bref, tout ce qui sert à mettre en relief le fond du roman est passionnant à lire ; par contre, dès que les protagonistes entre en scène, l’intérêt tient le temps de voir les tenants et les aboutissants des personnages, ensuite, ce n'est qu'un vain roman d'espionnage où la course poursuite prend vite le pas sur des considérations plus internationalistes. Si un curseur plus inspiré avait inversé la proportion de ces deux entités, le texte grandissait de façon fondamentale. Malheureusement, des pages sans un grand intérêt se succèdent les unes aux autres bien inutilement pour atteindre un roman qui frôle les 700 pages !

      Néanmoins, ce livre doit être lu, car il interroge la pensée courante qui veut que seule l'Allemagne a pu accoucher du nazisme. En vérité, le nationalisme est un mal qui peut prendre naissance dans n'importe quel pays, dans la mesure où les forces le menant au pouvoir ne rencontrent pas une adversité significative. L'abjecte rôde partout. Attention, nul n'est à l'abri.

      Il doit également être lu afin de nous faire prendre conscience de la fragilité des faits historiques. En effet, un simple grain de sable, tel l'effet papillon, peut changer la face d'un pays, d'un conflit, et pour finir : la face du monde. Assurément, sous la prédominance de ces mêmes grains de sable, année après année, jour après jour, le monde prend des directions insoupçonnées, des orientations originales, qui, si elles ont une seule particularité, c'est bien d'affirmer avec la plus grande péremptoirité qu'il est totalement impossible de se prononcer sur ce que le futur sera. Restons donc humbles envers demain.

      Sans vouloir être un acharné du style, l'ensemble de l'écriture aurait gagné à loucher du côté d'un Williams Styron ou d'un Graham Green, car, quand le récit manque à ce point de relief, le style peut tout sauver.

      Sous couvert d'écrire une uchronie, C.J. Sansom nous narre une énième histoire d'espionnage, heureusement qu'il encadre un récit tout en langueur dans un contexte historique digne de ce nom.


13 nov. 2020

 Visite du jardin automnal.

 Partie 2



La sauge coccinelle avec ses fleurs partant vers  l'azur.



        Quand la Gaillarde prend ses couleurs

d'automne.



               Sous la ramure du châtaignier,

les feuilles glissent du vert au cuivre.



Quand l'Hydrangea prend lui aussi sa coloration de novembre.




Idem pour le hêtre.




Sortant de nul part, peut-être un actinidia, l'arbre des kiwis !?!



Pleine de rosée, une toile d'araignée prise dans les premiers rayons de l'aube.




Un camélia nommé Cléopâtra.



Le même, visité par un frelon peut-être appelé "César", qui sait ?




Nommée aussi Doucette, mais plus connue sous le nom de Mâche !



D'un rose flashy, les dernières fleurs de géranium avant l'hiver.



Tel un fakir, Bouddha trône sur son trône de bogues de châtaignes.



Déshabillage des peupliers par le vent de novembre. 




On ne va pas se quitter sans la bébête du jardin avec sa couverture automnale !

A bientôt !

5 nov. 2020

 


Perfidia - James Ellroy - Babelio

" Perfidia "   de James Ellroy   8/20


Une descente vertigineuse dans l'enfer de l'humanité... et de la littérature.

      Le 6 décembre 1941, quatre japonais, les Watanabe, sont découverts morts à Los AngelesMeurtre ou suicide ? Le lendemain, l'empire japonais attaque Pearl Harbour. Le LAPD (Los Angels Police Départment), pour se débarrasser du problème en ces temps de déclaration de guerre, n'hésite pas fabriquer un coupable idéal. Le sergent Dudley Smith, un homme aux dents longues, dirige l'enquête qui s'annonce lucrative, tant l'hystérie du climat de guerre se prête à tous trafics, notamment à l'encontre des très nombreux citoyens américains d'origine japonaise. De son côté, William Parker, jeune officier alcoolique, s'engage dans la voie du combat de l'anticommunisme qui se dessine à l'horizon. Hideo Ashida, jeune japonais de la police scientifique de Los Angeles, est tiraillé entre mille maux. Puis, il y a Lee Blanchard, Reynolds Loftis, Ray Pinker, Turner Meeks, Elmer Jackson... et des dizaines d'autres... des centaines d'autres. Tous soudoient, menacent, traficotent, corrompent, infectent, avarient, souillent, pourrissent une société qui n'en avait vraiment pas besoin.

      Narration foisonnante et interminable, casting ample et ennuyeux, violence psychique, violence physique, violence omniprésente. Vous l'aurez compris, pour mon premier James Ellroy, je ne suis pas déçu... enfin si, justement. A la fois, empêtré dans l'aridité d'une écriture sans relief, dans l'austérité d'une écriture taillée à la hache et dans l'immensité d'une écriture fleuve, je me suis noyé, irrémédiablement noyé. Impossible de dépasser la page 260, c'est plus fort que moi, même en insistant, rien n'y fait, mon corps s'insurge, se rebiffe, regimbe, ma perdition est totale, exsangue, je capitule sans condition !!!

      Mais pourquoi ce vif rejet, l'histoire avait tout pour rendre ce bouquin passionnant ? D'abord, devant le foisonnement interminable de la narration, James Ellroy ne pouvait-il pas resserrer l'intrigue pour nous livrer 400 pages, et non pas les plus de 800 qui sont véritablement de l'étouffe lecteur. Ensuite, le style, ou plutôt son absence se fait cruellement sentir. Certains parlent même de bouillie littéraire ou d'une prose débilitante. Toutes ces phrases courtes, saccadées, exsangues, ça va un temps, mais sur la longueur cela tourne à l'hystérie voire au ridicule. Il y a aussi ce casting extra-large avec 1000 personnages, où du moins, c'est l'impression que j'en ai eu ! Difficile de ne pas perdre le cours de l'histoire quand trop d'intervenants viennent nager dans les eaux troubles de la LAPD. Et puis cette corruption qui court à tous les étages, comme une épidémie virulente dont personne n'échapperait. Aucun protagoniste ne peut se soustraire à la gangrène de la corruption, quand ce ne sont pas les starlettes égocentriques débordantes de concupiscence. Sans oublier la perversion, la débauche, la dépravation, l'immoralité. Cela ne fait-il pas un peu trop ? Pas le moindre rayon de lumière dans ce tombereau de ténèbres ! Sincèrement, je me demande combien de lecteurs ont réellement lu, jusqu'au bout, ce bottin bourratif ?

      Et quand je songe à tous ces critiques littéraires qui ont encensé ce roman, je préfère penser que l'on n'a pas du lire le même livre !

      De toute cette logorrhée en ressort une société qui ne mérite qu'un anéantissement total et sans appel. Assurément, quand il n'y a rien à sauver, ni personne, il ne reste plus qu'à sombrer corps et âme dans un gouffre abyssal. Alors, que les entrailles de la terre s'entrouvrent en une bouche béante pour engloutir cette société où bassesse rime avec déliquescence.