29 janv. 2021

 


" Watership down "   de Richard Adams   9/20


      Véritable expérience de courage, d'abnégation et de survie... chez les lapins !!!

      Sortie en 1972, et vendu à plus de 50 000 000 d'exemplaires, ce roman surprend énormément, avant de séduire... ou pas !?!

      Dans les fourrés de la campagne verdoyante du Sud de l'Angleterre vit, sous un régime autoritaire, une communauté de lapin dit de Garenne. Un jour, présentant une grande menace sur leur société, Fyveer, un lapin chétif et de piètre naissance, décide de partir à la recherche d'une terre nouvelle. Une poignée de ses congénères vont l'accompagner dans sa recherche d'un monde meilleur. Bravant mille dangers, leur quête prend l'allure d'une incroyable odyssée.

      Il faut vraiment aimer les lapins et se passionner, sans limite, pour leurs aventures pour avaler les 540 pages du roman ! D'autant que le style manque sensiblement de relief et que les péripéties de ces lapins traînent, un tantinet, en longueur. Certes, quelques rebondissements ont lieu (pour une histoire de lapins c'est normal), certains personnages deviennent attachants, mais la trame narrative s'alanguit à un tel point que le livre m'est souvent tombé des mains, ne voulant pas céder trop vite aux sirènes de l'abdication, je l'ai ramassé, mais quand le cœur n'y est plus, j'ai fini par poser un lapin à mes rendez-vous de lecture après la 250ème page, non sans avoir été lire un résumé sur Wikipédia, ce qui était tout aussi bien !

      Malgré ces péripéties de lecteur déçu, cela ne m'empêche pas d'avoir un avis sur le fond. Bien que l'auteur s'en défende, que d'allégories ou de symbolismes ou encore d'anthropomorphismes se glissent derrière cette histoire de lapins ! Et en premier lieu : l'exil. Comment ne pas faire le rapprochement avec le peuple hébreu à la recherche de la Terre promise ? La colline de Watership down, tient naturellement lieu de paradis où enfin les lapins pourront mener une vie paisible. D'autant que, de la garenne totalitariste d'où ils viennent, certains d'entre eux étaient considérés comme des lapins de seconde catégorie, des moins que rien. Dans cette quête vers l'inaccessible étoile, comment ne pas songer au célébrissime Seigneur des anneaux de Tolkien ? De même, n'y-a-t-il pas des similitudes avec l'Odyssée d'Homère en regard de la figure du héros (Hazel) qui s'affirme tout seul grâce à son courage et à son altruisme. Et que dire de celle de Cassandre (Fyveer), dont les dons de voyance sont enfin crus par ses congénères ? D'ailleurs, cette chevauchée en milieu hostile empreinte beaucoup à la Bible, et principalement à l'ancien testament. Il n'y a qu'à lire les nombreuses références au dieu Krik, sans oublier un final digne d'une montée au ciel.

      A la décharge de Richard Adams, il faut reconnaître qu'il prône de belles valeurs : le courage, la solidarité, la compassion. Cette histoire de lapins touche par son message universaliste. Les passages mythologiques d'un aïeul particulièrement rusé, ont quelques choses du fameux goupil dans le Roman de Renart. Ce livre souligne également la destruction de la Nature avec ses petits animaux par l'Homme et son désir inassouvi de s'approprier la terre sans se préoccuper du petit peuple qui y vit déjà depuis une éternité.

      Avec du style, avec un élagage conséquent, ce roman aurait pu gravir les marches vers une reconnaissance universelle. Néanmoins, je dois être dans l'erreur, car pour dépasser les 50 millions d'exemplaires vendus cela doit relever du chef-d'oeuvre... enfin... je connais un livre vendu à 2 500 000 000 d'exemplaires dans le monde depuis sa parution : la Bible, pour ne pas le citer, et dont l'écriture est d'une platitude folle, d'un style inexistant et qui raconte une histoire sanglante et abracadabrantesque ou se mêlent exterminations et sacrifices. En effet, sa lecture m'a demandé un puits d'abnégation, mais comment passer à côté d'un tel succès mondial ? Tout cela pour dire que des chiffres colossaux de vente n'attestent en aucune façon les qualités intrinsèques du texte. Et puis, franchement, qui l'a réellement lu jusqu'au bout ? Cette question est valable également pour la Bible.

      Pour conclure, ce roman est avant tout une belle et intelligente  lecture pour la jeunesse, et étant un vieux briscard, il était impossible de m'y enthousiasmer. 


20 janv. 2021


 

HAÏKU   Partie CLI


°°°°°°°°°


grosse bourrasque

la pluie balayée

remonte au ciel



fin d'averse de janvier

une belle flaque d'eau

le bain joyeux des merles



après la pluie

sous la glycine d'hiver

il pleut encore



les branches du saule

sans feuilles depuis longtemps

encore bousculées par le vent



soir de janvier

toujours une clarté

oh, la pleine lune !



13 janv. 2021


" L'anomalie "   de Hervé le Le Tellier   16/20


      Quand le temps nous interroge sur le temps !

      Ou qui n'a pas rêvé d'être confronté à soi-même ?

      Un vol d'Air France Paris/New-York, sensé atterrir à l'aéroport Kenndy en juin 2021, est détourné vers une base militaire américaine. Trois mois plus tôt, ce même vol de la même compagnie, avec les mêmes passagers, s'est déjà posé à New-York. Les scientifiques et les services secrets américains sont en pleine consternation. A quoi sont-ils confrontés ? Une simulation improbable, une inversion du temps ou à un parfait clonage de masse ?

      Je suis autant mitigé que subjugué : maints moments captivants, maintes réflexions attrayantes sont noués et mêmes noyés dans un océan sentimental, parfois trop envahissant.

      Avant de véritablement plonger dans le cœur du vortex Le Tellien, il faut parcourir les 134 pages relatant le parcours professionnel ou/et amoureux de 11 passagers du vol AF006 Paris/New-York. Dès lors ou enfin (serais-je tenté d'écrire), s'élabore une montagne de théories essayant d'élucider le grand mystère de ce bégaiement du temps. En effet, dans une deuxième partie, plus enthousiasmante, on observe les différents pays concernés par cette anomalie s'évertuer à mettre un semblant d'ordre dans ce désordre. Naturellement, les réseaux sociaux, les démagogues de tout ordre, les croyances et les incroyances, viendront mettre leur grain de sel, charriant avec eux multiples dangers aux conséquences exponentielles.

      En arrière garde, il y a l'idée de la deuxième chance, puisque incompréhensiblement le destin rebat les cartes, pourquoi ne pas s'emparer de l'opportunité d'expérimenter autre chose ? Comme s'en amuse Le Tellier : '' Le kaïros sonne parfois deux fois."

      Certes, L'anomalie est une oeuvre de fiction dans notre monde actuel, à la hauteur d'une folle dystopie, mais elle extrapole également le concept de civilisations technologiquement avancées, nous projetant avec un matérialisme farouchement éclairé, dans une dimension virtuelle, Matrix n'est pas loin !

      Néanmoins, derrière le paravent un rien trompeur de l'intrigue, Hervé Le Tellier veut juste interroger scientifiquement, philosophiquement et religieusement l'Homme. L'auteur glisse sous les lourds pavés d'un pitch alléchant, sur l'immense plage de nos sentiments profonds et de nos désirs honteux ou passionnés, bref il questionne le sens de nos vies. Sous ce prisme artificiel, il positionne l'Homme face à son propre miroir, mais, pareil à cette glace, l'Homme réfléchit-il pour autant ? Son instinct animal, ses croyances fallacieuses, ses idées surfaites sont-ils immuables ? Apprend-t-on foncièrement de ses erreurs ?

      Malgré quelques longueurs, je dois reconnaître que L'anomalie possède une singulière virtuosité, qu'il entremêle adroitement les genres, les hypothèses scientifiques et de surcroît, une multitude de références littéraires. Alors, pourquoi bouder son plaisir ?


4 janv. 2021


HAÏKU   Partie CL


°°°°°°°°°


an tout neuf

toute première gelée

et poussiéreux Covid-19



peur sur le monde -

le virus est partout

sauf dans nos cœurs



nuit glaciale

le silence du ciel

bruyant d'étoiles



les souvenirs -

le bonheur

en goutte-à-goutte



que de souvenirs vétustes

accrochés au passé

des nœuds du temps