29 avr. 2021

 


HAÏKU   Partie CLIV

°°°°°°°°°


sous les frimas d'avril

bourgeons de glycine grillés

ni fleur ni parfum pour rêver



chemins embroussaillés

partout des herbes folles

la vigueur du printemps



posée sur l'horizon

la pleine lune

une bulle dans la nuit



sous la lumière lunaire

entre gris clair et gris foncé

le feu des pâquerettes



jardin d'avril -

avec les pommiers en fleurs

plus d'horizon




25 avr. 2021

 


" Le lit d'Aliénor " Tome I  de Mireille Calmel   12/20

      C'est à la fois osé et cela ne manque pas de panache, puisque, pour son tout premier roman, Mireille Calmel s'empare de la jeunesse de la célébrissime Aliénor d'Aquitaine, ouvrant ainsi le tout premier tome d'une saga dynamique. Il y a de la hardiesse et une bonne dose de générosité dans cette démarche ambitieuse. Néanmoins, devant le côté inévitablement casse-gueule de cette tentative, l'essai est-il marqué ?

      Comme le diraient les joueurs de rugby de la région d'Aquitaine : " Essai réussi, mais pas transformé ! ". En effet, la noble intention est là, mais la manière laisse quelque peu à désirer. Je m'explique : effectivement, nous suivons le parcours de la jeune duchesse d'Aquitaine depuis ses 12 ans, en passant naturellement par son premier mariage à 15 ans avec le roi de France : Louis VII, sans oublier leur présence lors de la deuxième croisade, l'ensemble courant jusqu'à ses 30 ans, soit le jour de son second mariage avec Henri II Plantagenêt. Tout est narré avec une plume généreuse, digne d'une belle littérature populaire. Seulement voilà, ce récit captivant, à l'image d'un biopic respectable, ne représente qu'un tiers du livre, le restant est attribué à une certaine Loanna de Grimwald, personnage inventé qui serait un peu fée et un peu sorcière, envoyée par son ancêtre Merlin l'enchanteur !!! Héritière des secrets druidiques, Loanna a une mission : devenir la dame de compagnie et confidente d'Aliénor, de manière à mettre en place toutes les conditions pour qu'elle épouse un jour le futur roi d'Angleterre : Henri II, arrière petit-fils de Guillaume le Conquérant et futur père de Richard Cœur de Lion !

      On peut comprendre que le personnage de Loanna de Grimwald, outre la voix narrative, soit là pour aider à mettre en valeur et en perspective la future Reine de France : Aliénor d'Aquitaine. De plus, avec la romance amoureuse entre Loanna et Jaufré Rudel, un troubadour ayant réellement existé, cela relance constamment le récit. Toutefois, une fois la lecture achevée, notre regard a été tellement décentré que l'on se demande quelle est la protagoniste principale du roman ? Loanna ou Aliénor ? Dommage qu'un personnage fictif prenne autant d'importance et que la pauvre Aliénor se retrouve reléguée au rang de second rôle ! Certes, un second rôle royal, mais de deuxième plan. C'est du moins mon fort ressenti, et je le partage avec... moi-même !

      De surcroît, en ces quelques 530 pages, les scènes de sexe sont si omniprésentes entre amours saphiques, incestueux, hétérosexuels ou tout simplement : coïts de remerciement (il faut bien attirer le lecteur hésitant), que cela frise l'overdose, d'ailleurs le titre pouvait déjà nous mettre la puce à l'oreille ! En regard de ce qui précède et de ceci, le roman aurait dû s'intituler : Le lit de Loanna de Grimwald !

      Malgré ces remarques, je dois reconnaître que Mireille Calmel sait, telle une historienne, nous captiver en regard des les plus belles pages de ce roman, notamment en faisant ressortir les différences flagrantes avec d'un côté Louis VII : sous une apparence de sérénité se niche un être torturé, manipulé par ses sentiments et par son épouse, car c'est un homme habité par la foi, incessamment écartelé entre Dieu et le diable, entre la raison et le charnel, entre le châtiment et le crime, et de l'autre côté : Aliénor d'Aquitaine, une femme au caractère fougueux, s'affirmant en toutes circonstances avec autorité. Avec de tels traits de caractère, le mariage entre Louis VII et Aliènor s'annonce comme une union entre l'eau et le feu !

      L'auteure excelle également dans la description de l'époque moyenâgeuse où tout repose sur Dieu et l'Eglise. L'Eglise qui veut le pouvoir absolu. L'église qui manœuvre les rois. L'Eglise qui fait tomber les têtes. L'Eglise qui sanctifie par le feu. L'Eglise qui appelle aux croisades. L'Eglise qui engrange les richesses autres que spirituelles. L'Eglise qui a su se rendre indispensable en tout sous le prétexte d'être née d'une volonté divine. Ainsi Dieu est partout ! Tous les malheurs qui frappent la population sont de sa volonté ! Dieu est omniscient ! Dans sa blancheur tyrannique bienfaitrice, Dieu, tel un immense drapé immaculé, recouvre tous les pays d'occident, toutes les consciences, toutes les âmes où la moindre velléité de liberté religieuse est irrémé-diablement condamné au bûché !

      On s'amuse aussi des intrigues, des complots, des tentatives d'assassinat, d'autant que l'essentiel tient de faits véridiques ou comment s'instruire en se distrayant. On prend le temps de flâner sous le soleil aquitain, le long de la Garonne où vins, fruits et poissons viennent régaler notre palais, tout en profitant des arabesques musicales que pléthores de troubadours viennent servir à nos oreilles. Cependant, en ce XIIème siècle, déchirant le rideau des futilités, quelques phrases résonnent : La folie des hommes seule était à blâmer. Ce siècle n'était fait que de barbarie. Tel un glas nous rappelant par-delà les siècles qui s'empilent, que l'Humanité continue de souffrir, inexorablement. L'Homme, en dépit des leçons de l'Histoire, reste un loup pour lui-même.

      En dehors de quelques libertés d'un auteure qui veut un peu trop nourrir son premier enfant littéraire, Le lit d'Aliénor reste un honorable roman qui dessille nos yeux sur une période lointaine de l'histoire de notre nation, dont le héros est une femme, ce qui est si rare, qu'il serait stupide de vouloir passer à côté !



12 avr. 2021


 " Arcadie "   de Emmanuelle Bayamack-Tam   11/20


      Dans le sud de la France, près de la frontière italienne, réside une communauté bien particulière en zone blanche : Le domaine de Liberty House, formé de naturistes, de personnes électrosensibles, de végétariens, de gens souhaitant se passer d'internet et de portable pour raison de santé. Ils vivent tous sous la coupe d'un gourou autant bisexuel que grassouillet. Dans cette phalanstère, Farah, une ado de 14 ans et ses parents y ont trouvé refuge. Malgré une atmosphère de liberté absolue, Farah ne parvient pas à s'épanouir dans ce paradis reconstitué. D'autant plus que sa certitude d'être une fille vient de voler en éclats !

      Même s'il y a de beaux discours de tolérance et d'amour universel, notamment sur les gens disgracieux ; même s'il y a toute une réflexion légitime sur la nourriture industrielle ; même s'il y a une antienne sur les gens vivants en marge : les LGBT, les hermaphrodites, les syndromes d'Asperger et les syndromes de Rokitanski ; même s'il y a ce droit à vouloir vivre autrement : sans onde, sans gaz carbonique, sans dioxine et autres engrais chimiques, même s'il y a un bel altruisme face à l'arrivée de migrants ; même s'il y a des regrets, des erreurs, des goûts amers et des secrets, le compte n'y est pas ! Ou plutôt tout y est en excès sous l'amplification outrancière d'un ratissage à tous les étages. De surcroît, on est à deux doigts de nauséabonds relents pédophiles, ça couche de partout, c'est merveilleux, faisons l'amour entre nous : les oubliés d'une société inique, et tant pis si cela implique les vieux avec des jeunes ou le contraire. En vérité, entre les coucheries et les repas en collectivité, le roman s'étire inexorablement en longueur, comme une idée distendue à l'extrême, fauchant en passant, tous les biens-pensants, l'essentiel étant de choquer le chaland. Et que dire d'une jeune fille qui voit ses seins régresser et une paire de testicules venir prendre leur place entre ses jambes ! Ne peut-on pas traiter de l'identité sexuelle sans faire appel à de tels artifices ?

      Tous les sujets sont abordés de façon trop caricaturales. Certes, l'auteure y apporte de belles pelles de subversivité, mais leur traitement ne supporte aucune controverse, tout part dans la même direction, sans nuance, ou si peu, comme si dans notre monde si déchiré tout était soit noir, soit blanc. 

      Néanmoins, le point fort du roman est sans conteste l'efficacité de la plume. Riche d'un vocabulaire prolixe et impétueux, il réveille une histoire qui en a bien besoin. En effet, 400 pages pour nous dire qu'il faut décaler notre façon de voir le monde, cela a failli me perdre en chemin, l'écriture m'a ainsi permis d'atteindre le mot fin avec soulagement.

      Avec une folle extravagance, un souci de provocation, un zeste d'humour, une singulière rudesse et une généreuse dose de délayage, Emmanuelle Bayamack-Tam nous livre un brûlot, pas dénué d'intérêts, mais qu'une substantielle épure aurait rendu plus digeste, plus vindicative. A moins que tout ceci, sous la couverture d'un style jovial et folâtre ne soit, après tout, qu'une bonne blague !?!


6 avr. 2021



 HAÏKU   Partie CLIII


°°°°°°°°°


au lendemain de Pâques

les enfants trop gourmands

tous pleins comme des œufs



chocolat liquide

le bonheur noir

en goutte à goutte



au centre du square

sous la fiente des pigeons

le buste de Victor Hugo



balade en forêt

aucun bruit

seulement mes pas



soir de printemps

ivre de fatigue

mon livre me lit



5 avr. 2021


 " Mon désir le plus ardent "   de Pete Fromm   12/20


      Si Maddy avait deux résolutions, c'était bien de ne jamais tomber amoureuse d'un jeune homme de son âge et encore moins s'il était guide de rivière ; seulement le destin, avec l'excentricité qui le caractérise, lui fait rencontrer Dalt, et toutes ses résolutions volent en éclats. Dès lors, armés de leurs vingt années chacun, ils s'engagent dans une histoire d'amour atypique et absolue, d'abord en se mariant sur les berges de la Buffalo Fork, dans le Wyoming, puis en décidant de fonder une famille. Seulement le destin, encore lui, décide de plomber sévèrement cette vie harmonieuse de petits bonheurs. Le couple résistera-t-il à ce bouleversement de leur existence ?

      Déroulée avec tendresse, servie par une écriture expressive et tendue, la narration trouble et effraie souvent, nous renvoyant à nos propres responsabilités. Chaque phrase gratte la surface de leur relation de couple, chaque chapitre ouvre un aspect différent de l'épreuve à affronter, telle une bombe à fragmentation. Malgré leur optimisme affiché, on a l'impression qu'un rien pourrait faire basculer leur union dans les affres d'un déchirement irréversible. Néanmoins, derrière la souffrance et la crainte, derrière l'ironie et le sarcasme se dissimule une époustouflante ode à la vie.

      Cependant, il faut quelque temps pour saisir et démêler les tenants et les aboutissants de l'histoire, tant les premières pages semblent un peu brouillonnes. Ensuite, il faut s'habituer aux ellipses du temps : chaque chapitre peut être séparé du suivant par plusieurs mois, voire plusieurs années. Il faut aussi assimiler les abréviations successives et aléatoires de tous les prénoms : Dalton devient Dalt, puis Da ! La déstabilisation est récurrente, peut-être faut-il la mettre en parallèle avec l'épreuve subie par Maddy et Dalt. Pour finir mes réprobations, j'ai étouffé sous l'omniprésence des dialogues, ils sont trop prégnants et ne laissent qu'une place infinitésimale à la nature. Pourtant, entre les rivières, les prairies, les arbres, les animaux sauvages, et que-sais-je encore, il y avait de quoi gonfler le roman d'une ampleur environnementale qui aurait pu alléger la lourdeur du propos. Et la collection Gallmeister n'est-t-elle pas réputée pour sa nature writing ?

      Malgré la force intrinsèque du thème, le traitement qu'en fait Pete Fromm m'a singulièrement décontenancé, néanmoins, les critiques dithyrambiques sont si nombreuses que je dois avoir tort. Je suis en quelque sorte déçu de ce sentiment de déception. Néanmoins, je ne peux m'empêcher de songer à ce que d'autres auteurs, tels David Vann ou Jean Hegland auraient pu écrire sur le même sujet.


2 avr. 2021

 Petit aperçu du jardin printanier.

Partie 1



Toutes ces fleurs de ficaires,

comme des milliers de petits soleils !



Avant de devenir de grandes et belles pivoines,

la phase de métamorphose est longue...




Nouveauté de l'année au potager :

la fève, avec ses fleurs magnifiques.



L'incontournable des balbutiements du printemps : Dame Jonquille !



Toutes prêtent à partir se cacher au jardin :

les poulettes en chocolat !



Nichée au creux de l'herbage :

une famille de muscari. 



Blottie dans la verdure,

et dans l'éphémère : une famille jacinthe.



Peut-être la plus belle du printemps :

la délicate violette.




Comme le magnolia, les fleurs apparaissent avant les feuilles : le forsythia.


Ami(e)s de la nature, à très vite !