" Le labyrinthe des esprits ou le Cimetière des livres oubliés, livre 4 " de Carlos Ruiz Zafon 18/20
Décembre 1959, dans une Espagne fermement muselée par la chappe de plomb franquiste, Mauricio Valls, le ministre de l'éducation et de la culture... disparaît ! Alicia Gris, une jeune femme en perpétuelle souffrance des séquelles de son passé, sera, en tant que membre de la police parallèle du régime de Franco, chargée de retrouver le ministre Valls dans les plus brefs délais. Il faudra toute la détermination et l'intelligence d'Alicia pour faire tomber les masques et pour découvrir l'abominable vérité cachée sous l'or des beaux palais des dirigeants nationalistes.
Une dernière fois et pour conclure sa tétralogie de façon grandiose, Carlos Ruiz Zafon nous entraîne dans les méandres clairs et obscurs des rues de Barcelone. Avec tout le talent romanesque qu'on lui connaît, il continue de tisser sa toile autour des personnages des trois premiers romans, même si chacun des livres avait leur fin propre. Dans cet ultime opus, à la manière d'une fête de famille, CRZ réunit ainsi tous ses protagonistes leur permettant enfin de chasser les ombres sépulcrales du passé, et d'accéder tardivement à l'entièreté de la vérité, éclairant sous un nouvel angle la totalité du cycle du Cimetière des livres oubliés. A l'image des pièces d'un puzzle s'emboîtant admirablement les unes dans les autres, nous révélant l'ensemble d'une fresque labyrinthique et ambitieuse. Une fresque rendant un bel hommage à la littérature, aux librairies et aux auteurs, mais surtout une belle vision du monde des livres : seul viatique, seul rempart et seule liberté face à la force coercitive et tyrannique de la censure.
La réussite de ce tome-ci vient de ses personnages féminins, notamment de l'obscure et indépendante Alicia Gris, une sorte d'Alice ayant chuté dans le pays, non pas des merveilles, mais celui des bombes, de la souffrance, des assassinats et des scélérats. Telle une Némésis ou une succube, elle sera l'arme du destin pour délivrer le juste châtiment.
Le succès de CRZ vient également de la virtuosité de sa plume, jamais mise en défaut, toujours alerte, prête à vous emporter dans la forêt de ses mots à travers les dédales insondables des rues du vieux Barcelone. Ville qui, au final, est peut-être le personnage premier de la série ; un être ni de chair, ni de de sang, mais qui néanmoins semble avoir au tréfond de son âme et de ses vieilles pierres un cœur qui palpite au rythme des mystères, des tragédies et des beautés qui l'habitent.
Avec simplicité, CRZ nous démontre qu'une vérité présentée toute seule, nue, ne convient jamais à tout le monde, elle garde ici ou là des parts d'ombre, des petits mystères capables à eux seuls de la faire rejeter en bloc ; alors que le mensonge, bien au chaud dans son alcôve d'hypocrisie, semble plus crédible juste parce qu'il correspond à nos attentes, à ce que nous voulons entendre, il est rassurant.
Ce dernier roman permet de délier les entremêlements, extrêmement travaillés, des vies, des passions et des trahisons courant sur les 2600 pages de la saga. CRZ nous prouve ainsi que sa tétralogie a plusieurs portes d'entrée, peu importe le chemin, tout se recoupe, tout rentre en osmose dans un époustouflant final digne des plus grands écrivains.
Vous bienheureux, qui n'avez pas encore eu le bonheur de pénétrer dans l'univers ténébreux et énigmatique de Carlos Ruiz Zafon, venez tremblez et vous perdre dans les ruelles pleines d'ombres et d'histoires du vieux Barcelone, vous n'en reviendrez peut-être pas !
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