3 mai 2014



 Histoire de la chanson Göttingen. 



     Trop longtemps, je n'ai pas compris le sens exact des paroles  de la chanson de Barbara " Göttingen ".

Je sentais naturellement qu'une grande puissance émotionnelle émergeait de cette chanson, mais sans en connaître la véritable origine.

Puis récemment, grâce à une chronique entendue sur un média, j'ai saisi tout le message contenu dans cette mélodie et ces paroles.

Curieux comme je suis, j'ai cherché à en savoir le plus possible.
Et comme c'est une merveilleuse histoire d'humanité, je ne pouvais faire autrement que de vous la narrer, simplement.

   Barbara de son vrai nom s'appelle Monique Serf, d'origine juive, elle est née le 9 juin 1930 à Paris.
Pendant la guerre elle échappe par miracle aux bombardements, aux dénonciations, elle est obligée de se cacher pour éviter les rafles, c'est dire qu'elle a en elle, une profonde et légitime haine de l'allemand, des boches !

C'est en juillet 1964 qu'est née Göttingen.
Cette année-là, alors que Paris va célébrer le 20 ème anniversaire de sa libération, les esprits sont encore vifs concernant toute cette époque avec les cendres du héros de la Résistance, Jean Moulin, qui vont être transférées au Panthéon.

Mais une nouvelle génération est là !
Qui commence à chanter la liberté, la fraternité.
Le mouvement " Peace and Love " est en marche, et Barbara est en phase avec son époque.

Nous sommes donc en Juin 1964, la carrière de Barbara est en pleine ascension, elle vient d'être engagée chez Philips et elle se produit avec les plus grands à  " L'écluse " ; petit cabaret parisien.

En ce temps-là, chanter dans un cabaret était presque aussi important que passer à la télé aujourd'hui.
C'est ce qui à fait sa renommée.

   Peu de temps après, elle se rend compte qu'elle a donné un accord à son imprésario pour aller chanter à Göttingen, une improbable ville universitaire allemande.
Elle dira dans ses mémoires : " J'étais en colère d'avoir acceptée d'aller chanter en Allemagne ! "
"Mais pourquoi est-ce que j'ai accepté d'aller là-bas, chanter devant ces allemands que je n'aime pas ? "

Göttingen en Basse-Saxe, aujourd'hui une ville de 130 0000 habitants, avec une tradition universitaire importante.

C'est une Barbara très irritée qui débarque donc le 4 juillet 1964 sur l’aéroport de Göttingen.
Le soir de son concert, elle n'est pas de bonne humeur ; elle n'a absolument aucune envie de chanter devant ce peuple qu'elle déteste viscéralement.

Malgré tout, bon an mal an, elle entre dans le théâtre et voit que le piano à queue qu'on lui a promis n'est pas là, elle fulmine d'indignation !

C'est une vieille crécelle à roulette qui trône sur la scène !
Elle déclare aussitôt : " Dans ces conditions là, ne compter pas sur moi pour chanter !!! "
L'atmosphère était de plus en plus délétère.

Puis, elle voit débouler des jeunes allemands, dont elle a eu si peur quand elle était plus jeune, blonds, athlétiques, qui lui disent : " Mais madame, il y a là, à côté une vieille dame qui possède un piano à queue, nous allons vous le chercher, nous vous l'amenons tout de suite, nous serions si heureux de vous entendre chanter dans ce théâtre."

Surprise d'une telle gentillesse, elle laisse faire.
Evidemment, cela prend du temps , mais ces jeunes allemands finissent par lui ramener un vrai piano.
Le concert peut alors débuter avec 1 heure 30 de retard.
La salle est comble.

Au final, Barbara vivra l'une de ses soirées les plus formidables.
L'accueil est extraordinaire, inimaginable, une chaleur humaine emporte la jeune chanteuse sur un nuage de bonheur.
Son émotion est totale, c'est les yeux très humides qu'elle achève ce concert si mal parti, émue jusqu'aux tréfonds de son âme.
Jamais, jamais, elle n'oubliera cette journée du 4 juillet 1964.

Elle restera une semaine, elle qui ne devait à l'origine ne donner qu'un seul et unique concert !

Sur place, pendant ces sept jours, elle apprendra à connaitre les gens.
Elle ira au devant des enfants, elle s'immergera dans cette population.
Rencontres bouleversantes d'humanité, d'humilité.

Son coup de coeur est inoubliable, et le septième jour, sur scène, elle chantera l'ébauche de la chanson Göttingen, qu'elle terminera d'écrire en 1967.

Chanson d'amour et de paix.

De toute évidence, les jeunes générations ont perdues de vue ce qu'a été la réconciliation franco-allemande.

Mais c'est précisément ce dont il faut se souvenir : dix siècles de guerre, 50 ans de paix, ceci est très précieux, il faut le cultiver.



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