" Au coeur des ténèbres " de Joseph Conrad 15/20
Cette grande nouvelle servira à Francis Ford Coppola pour réaliser le film qui lui valu d'ailleurs la palme d'or à Cannes en 1979 : " Apocalypse now ".
L'histoire tient en peu de mots : A la fin du XXème siècle, afin de découvrir l'Afrique, un homme nommé Marlow, se fait embaucher par une compagnie commerciale dans le but de rentrer en contact avec l'un des meilleurs chasseurs d'ivoire de cette entreprise, un certain Kurtz (niché au coeur du fleuve Congo), dont personne n'a de nouvelles depuis bien trop longtemps.
Au fil de la remontée du fleuve, quand la forêt dense et tropicale hypnotise puis glace le voyageur par son oppressante présence, une allégorie se dessine, comparant cette navigation vers la source comme un voyage dans le temps, celui du temps des premiers hommes, celui de la sauvagerie d'un monde ancien où tout n’était qu'instinct et barbarie.
Avant son arrivée en Afrique, Kurtz était un homme cultivé doublé d'un musicien remarquable, mais cette nature vierge et la population autochtone agira comme un révélateur sur sa personnalité profonde. Remontant du tréfonds de sa conscience, tout un monde de ténèbres qui sommeillait, en attente d'une noire sollicitation.
Ce continent d'exotisme, de mystère, de violence et d'incompréhension, pour celui qui n'y est pas né, finira par métamorphoser Kurtz en dément démiurge, qui ira jusqu'à vouloir se faire idolâtrer comme un dieu.
Les noirs y sont décrits comme des bêtes apeurées, soumis à une exploitation totale de la part de blancs qui, eux-mêmes, sont impressionner par cette population sauvage peut-être maléfiques voire anthropophages.
Pèlerinage cauchemardesque, rencontre fatale d'une noirceur abyssale, où l'homme blanc comme l'homme noir, sans le moindre artifice, se confronte inévitablement à lui-même, à ses instincts les plus basiques, les plus sauvages, dans cet univers de ténèbres.
On peut y voir aussi une dénonciation des dérives de la colonisation : un grand mépris aboutissant à une forme d'esclavage, une exploitation outrancière des terres et de la faune, bref un prosélytisme civilisateur, qui engendrera violence et folie.
Il ne s'agit surtout pas d'un livre facile, rien n'est évident à la première lecture, mais cette écriture lourde et sombre qui joue souvent l'esquive et qui colle aux yeux du lecteur, suggère plus qu'elle ne dit, d'où la nécessité d'un petit travail de reconstruction, mais l'essentiel ici est dans cette ambiance poisseuse, glauque et malsaine, cette expérience s'identifie assurément à une entrée : " Au coeur des ténèbres ".
Au final ce roman se positionne comme une réflexion des plus fondamentale : L'homme s'est-il vraiment affranchi sous le couvert d'une société dite civilisée de tous ces instincts ancestraux les plus noirs ?
Vaste question philosophique !
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