2 mai 2015


Une comparaison bucolique de magenta.



Dans mon jardin, je réserve toujours une petite surface d'environ deux mètres carrés, dédiés au hasard, à l'aléatoire.

Volontairement, je n'y sème et n'y plante strictement RIEN !

Afin que la nature y soit totalement libre de s'exprimer comme elle le désire, et ainsi de m'offrir ses présents. Et croyez-moi, les surprises font florès !

D'ailleurs, j'en veux simplement pour preuve ces derniers cadeaux nés de ces aléas : L'épilobe en épi, une belle onagracée, et la Nielle des blés : une caryophyllacée, toutes deux éclaboussent mon jardin d'un somptueux magenta !

L'épilobe débute sa vie végétale en créant de larges feuilles trapues qui s'épanouissent sur le sol, avant de faire progresser timidement une tige râblée vers l'azur. La nielle préfère prendre urgemment la direction du ciel, s'érigeant sans se poser de questions vers le firmament.

L'épilobe possède un calice aux sépales arrondis, douces et affables !

La nielle est armée de sépales piquants et agressifs, dressés comme sur la défensive !

Le parfum de l'épilobe semble vaporeux, ineffable et aérien !
La nielle peine à révéler une effluve, comme si elle hésitait, balbutiait, puis finalement... renonce !

L'épilobe crée des fleurs par grappes et par centaines, rangées en épis (d'où son nom), qui restent ouvertes généreusement jour et nuit. Celles de la nielle des blés s'ouvrent et se referment quotidiennement, tel un coeur qui bat au rythme des rayons solaires.

Dans sa structure globale, l'épilobe paraît harmonieuse et magnanime, tandis que la nielle semble dissonante et nihiliste !

L'épilobe est dans l’insouciance voire la folie. Paradoxalement, la nielle est dans le concret, le factuel.

L'épilobe n'est qu'amour et générosité. La nielle n'affiche que haine, traîtrise et perversion !

L'épilobe n'est aucunement farouche et se donne sans retenue, sans négocier. La nielle est perpétuellement dans la crainte, le doute et la méfiance.

Bref, une impression indicible d'altruiste pour l'une, et d’ostracisme vénéneux pour la deuxième.

Elles ont débuté leur croissance au cours de l'hiver précédent, j'ignorais alors qui elles étaient. Certaines personnes malotrues ou pire (j'en connais), auraient hurlé aux mauvaises herbes, et les auraient sauvagement arrachées sans autre forme de procès ! 

Heureusement pour elles, ces mignonnes ont choisi mon jardin !
Dès l'apparition de leurs fleurs, début Mai, j'ai pu les identifier sans erreur.

L'épilobe en épi est recommandé par la médecine populaire contre l'hypertrophie de la prostate. Ses jeunes feuilles peuvent être consommées comme légume. Chaque plant donne des milliers de graines minuscules, qui sont transportées grâce à leur aigrette de poils, et par l'influence d'un vent coquin, jusqu'à dix kilomètres à la ronde.

La nielle des blés (que j'ai dépeint volontairement de manière péjorative et abusive, afin de mettre en perspective un contraste certain, je m'en excuse d'ailleurs auprès des caryophyllacées susceptibles, qui risqueraient de m'en tenir rigueur, et pourraient fomenter à mon égard et dans mon jardin, une rébellion dévastatrice), était autrefois redoutée, car elle pouvait produire une farine toxique, quand ses graines se mêlaient au blé. Car leur taille identique apportait un risque de confusion non négligeable. C'est ainsi que jadis on consommait involontairement de la nielle toxique, ou qu'on la ressemait avec le blé. En cas d'absorption, elle donne le vertige et des crampes, et peut être mortelle, d'où mon parti-pris arbitraire et excessif de développer en parallèle, ces deux plantes nomades issues de mon jardin du hasard, devenues les reines de mon laboratoire vert. 

Grand merci à mère nature !


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