" Nymphéas noirs " de Michel Bussi 15/20
Ce polar se déroule à Giverny, village rendu célèbre pour son jardin où Monet vécut la dernière partie de sa vie, réalisant sa grande série des nymphéas qui fera de lui un peintre mondialement connu.
Le corps d'un homme vient d'être retrouvé dans un bras de l'Epte, petit cours d'eau jouxtant les magnifiques jardins de l'artiste. Menée par un improbable duo de policiers, l'enquête commence sur fond de passion dévastatrice, de rumeurs, de toiles perdues ou volées, et du meurtre quasi-identique d'un enfant de 11 ans, dans ce même ru, mais.. c'était dans les années 30 ! Le mystère s'épaissit, d'autant que les fausses pistes font florès.
Trois femmes planeront au coeur de l'intrigue : Fanette Morelle, une fillette de 11 ans redoutablement douée pour la peinture ; Stéphanie Dupain, une institutrice de 36 ans, follement séduisante ; et une vieille femme de 80 ans, aux yeux de hibou qui surveille tout ce petit monde du haut de sa maison tour, ce n'est pas pour rien que dans son village elle est surnommée : la sorcière !
Autour de ce trio féminin, Michel Bussi va nous concocter un plat bien étrange, à la fois tragique et poétique, qui par l'originalité du scénario (qui se révèle être un vrai jeu de miroirs), restera longtemps après sa lecture, dans nos mémoires.
L'un des points forts du roman, est sans conteste cette plongée historique dans l'univers de Monet, d'abord grâce à une biographie partielle savamment mélangée au récit, puis par ces enchanteresses descriptions des lieux : toutes les couleurs y sont, les odeurs et la magie végétale du bassin des nymphéas, avec en plus l'ineffable mystère de la création artistique, celle qui captive le quidam et fascine le connaisseur.
Avec une plume légère et taquine, qui pourrait s'apparenter à un pinceau, l'auteur avance par petites touches que ce soit dans le récit, mais également dans l'enveloppe périphérique : cet écrin de sensations picturales qui colore notre imaginaire, dès le tout début, puisque ce rouge qui se dilue en rose de plus en plus pâle sous le vert des herbes folles, dans ce bras de l'Epte, n'est autre que le sang s’épanchant d'une blessure mortelle !
Un bon point aussi pour les critiques acerbes, mais souvent frappées au coin du bon sens, que Michel Bussi émet par le truchement de la vieille dame tout au long du récit, cela en est souvent jouissif de vérité.
Cependant ce Michel Bussi est un sacré roublard, un farceur, un coquin, voire un fieffé escroc ! J'en veux pour preuve le piège diabolique dans lequel il fait choir le lecteur, en effet, sa mise en place de l'intrigue est d'une telle malice, d'une telle filouterie, qu'honnêtement un lecteur lambda ne peut deviner le fin mot de l'histoire. Vous me direz que je ne suis pas bien malin, et vous aurez sûrement raison, mais la question n'est pas là, puisque l'auteur oriente son roman de façon nettement fallacieuse et vicelarde, au point d'écrire des situations qui n'ont jamais pu se produire. Naturellement je ne peux pas en dire plus, au risque de trop en dévoiler, ce qui pour un polar serait inexcusable. Mais j'en ai peut-être déjà trop dit ! Tant pis !
Autre point tendancieux, les invraisemblances inhérentes aux polars, qui certes, stimulent le récit qui perd alors en justesse, comme faire soulever sans effort une pierre de 20 kilos par un ... Mais chut ! Je n'ai rien dit !
Néanmoins, c'est un brillant polar qui se lit sans déplaisir grâce à cette ambiance impressionniste, intelligemment mise en exergue, et par son scénario retors, que vous n'êtes pas prêt d'oublier. Ah ! Si vous aimez vous faire manipuler, vous faire rouler dans la farine, vous faire duper dans toute la longueur, pas de doute : c'est le roman idéal.
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