23 sept. 2018

" Le sans Dieu "   de Virginie Caillé-Bastide   15/20

      Bretagne, hiver 1709. Une vague de froid extrême s'abat sur le royaume de France, déclenchant une famine épouvantable. Arzhur de Kerloguen, modeste hobereau, assiste impuissant au décès du dernier de ses sept enfants. Sa femme devenant folle, il abandonne sa terre natale, tout comme le peu de foi qu'il lui restait. Fuyant sa vie dévastée, et abhorrant tout ce qui se rapproche plus ou moins de la religion, il décide que désormais, il provoquera outrageusement Dieu dans des agissements d'une cruauté sans nom.
      Au large des Caraïbes, 1715. Un farouche capitaine, surnommé l'Ombre, fait régner la terreur dans les mers chaudes, qu'il écume sans relâche à bord de son navire pirate baptisé "Le Sans-Dieu". Lors de l'attaque d'un galion espagnol, il épargne la vie d'un prêtre jésuite. Un dialogue haut en couleurs s'instaure alors entre ces deux hommes, que tout sépare, sur la brûlante question de l'existence de Dieu.

      Virginie Caillé-Bastide nous emporte, dès les premières pages, dans un tourbillon effréné d'aventures épiques. Dans ce cocktail détonnant, où le rhum et la violence coulent à flot, elle ne mégote pas sur les thèmes abordés : vengeance, piraterie, amitiés, trahisons, île sécrète, trésors, esclavages, mer chaude et requins. Naturellement, me sont revenues en mémoire mes lectures de jeunesse, notamment celles des romans de Jules Verne et de Stevenson. Tel un plaisir au goût légèrement suranné.

      Privilégiant le rythme, la romancière élude un peu trop la dimension psychologique des personnages. Des descriptions plus ambitieuses, sans alourdir l'histoire, auraient donné une amplitude plus généreuse à l'ensemble. Il manque juste un peu de mâche, pour orner sans encombrer ce récit afin d'en faire une oeuvre digne des romans d'aventures de ma lointaine jeunesse.

      L'écriture, dans un souci d'épouser les tournures de l'ancien français, est parfois à la limite du ridicule et du saugrenu. Mais la plume est souvent alerte, virevoltante et pleine de truculence.

      Cependant, si je me suis penché sur ce livre atypique, de la rentrée littéraire 2017, c'est pour l'affrontement entre le religieux et l'athée. Les tempêtes qui agitent leur âme donnent d'excellentes scènes à coup d'arguments singuliers, même si, ces combats oraux mériteraient, là aussi, un développement plus approfondi, mais peut-être sortirions-nous alors du roman traditionnel pour entrer dans des considérations plus philosophiques.

       Au style flamboyant, Le Sans-Dieu est un roman d'aventures à l'ancienne, jonglant plaisamment entre flibusterie et duel spirituel. Mené tambour battant, il regorge de rebondissements et de combats, sans oublier la petite pointe d'amour, telle la pincée de sel, essentielle pour que la recette aie du goût. Même si l'histoire aurait mérité un étoffement, l'ensemble est honorable et la dernière page arrive beaucoup trop vite, c'est un signe ! A condition de passer sur un ou deux anachronismes et autres rafistolages peu crédibles, comme le fait que tout le monde parle la même langue (esclaves, français, espagnols), vous passerez un dépaysant moment de lecture, idéal pour l'été... mais sans plus !


      

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