3 nov. 2022



" Loin de l'Irlande "   de Ann Moore   11/20


      Veuve depuis peu, Grace O'Malley s'embarque sur un voilier de commerce pour traverser l'Atlantique vers le Nouveau Monde, afin d'y retrouver son frère Sean, qui l'attend depuis des mois. Le cœur brisé, car non seulement Grace fuit une Irlande natale frappée de famine et de guerre où plus aucun espoir n'est permis, mais elle est contrainte d'y laisser son père et son nouveau-né, trop faible pour endurer un tel voyage.

      Cette deuxième partie d'une trilogie reprend les codes du premier tome, (Grace O'Malley critiqué en ces pages le 28 mai 2017) malheureusement, sans les améliorer. En effet, la plume reste terne pour ne pas dire insipide, les rebondissements sont peu crédibles, et surtout, les protagonistes sont si caricaturaux, ébauchés en deux coups de pinceaux, ils ne varient jamais d'une once : les méchants sont trop méchants, et les gentils, indécrottablement gentils. Pas d'évolution, pas d'introspection sur l'origine de la violence, une psychologie, à part pour Grace, réduite au minimum syndicale, quand il y en a une ! Débrouillez-vous avec ça !

      Par contre, l'intérêt de ce roman, oui il y en a un, est défini par l'évocation appuyée de forts moments historiques : les épouvantables traversée de l'Atlantique où les plus pauvres des migrants irlandais étaient relégués en fond de cale, d'où une mortalité effroyable ; une fois débarqués sur le Nouveau Monde ces mêmes irlandais faisaient encore partie de la classe la plus basse de la société, seuls les noirs étaient moins bien considérés qu'eux ; les cortèges d'injustice et de misère inhérents à une immigration massive ; la vie nouvelle des esclavages ayant réussi à gagner, au péril de leur vie, les états abolitionnistes, mêmes si des chasseurs de prime d'esclaves en fuite rôdent partout ; les origines de la fondation de l'église des Mormons en 1830. Ainsi, toutes ces pages révélatrices d'un climat, d'une époque en évolution nous font digérer ces autres pages au manque criant de relief.

      Effectivement, envisagé comme lecture de plage, c'est idéal : léger, quelques scènes dramatiques, avec de bonnes pages d'amour hésitant, puis contrarié... à l'effigie de mon avis final : hésitant au début, puis franchement contrarié au fil des pages. Néanmoins, écrit avec une plume plus agressive, et bien moins académique, ce roman avait en lui la matière pour toucher à l'universel et en faire un chef-d'œuvre !


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