" Animal " de Sandrine Collette 17/20
Au cœur de la forêt népalaise vit Mara. Un jour, elle découvre deux jeunes enfants attachés à un arbre, sans réfléchir, par réflexe, elle les libère et les emmène vivre avec elle. Cependant, si elle reste dans sa cabane, les responsables du ligotage vont la retrouver, alors elle fuit vers la grande ville avec les enfants...
Vingt ans plus tard, au Kamtchatka, sur cette péninsule pleine de forêts et de volcans, débarque un groupe de chasseurs d'ours. Vite ils en prennent un en chasse, un spécimen colossal. Dès lors, une poursuite s'amorce, mais la grosse bête est loin d'être bête...
Une fois de plus Sandrine Collette sait emporter son lecteur dans ces histoires où l'homme se voit contraint d'aller au bout de lui-même, de s'adapter jusque dans ces derniers retranchements. Il n'y a pas de triche, pas de toc, que du brut et du sauvage à l'état pur. La nature ne fait pas de cadeau, l'homme non plus. Toute la noirceur du monde est là, obligeant toute faiblesse à se payer cash. Seulement le jour où l'inférieur réussit à s'affranchir de sa misérable condition, l'être qui en émerge ne peut être que très dangereux ; fabriqué par ceux-là mêmes qui l'asservissaient.
S'il y a un personnage qui transcende le récit, ce ne peut être que Lior, une jeune femme dont le regard vous transperce de sa volonté et de son ineffable chagrin. En pleine nature, elle possède un instinct, une acuité et un flair affûté. Une vraie féline, à la limite de basculer dans le monde animal. Néanmoins, au fond d'elle, on sent poindre une fissure, une souffrance venue du fond des âges, une douleur lancinante que rien ne peut calmer.
Qu'ils soient animal ou humain, pour survivre, les protagonistes devront piocher au fond de leurs tripes la force de vaincre, d'aller au bout du bout d'eux-mêmes. La tension que développe l'autrice est si palpable, si insoutenable, que la frontière entre l'homme et l'animal sera parfois franchie ; tant de sauvagerie chez l'humain et tant d'humanité chez l'animal.
La plume, tel un animal sauvage, se déploie, se courbe, se raccourcit avant de repartir au galop, mangeant ses propres mots, elle adhère à l'histoire afin de mieux la transcender.
Dans une nature omniprésente, entre ours et tigre, Sandrine Collette nous embarque sur un chemin tortueux pour nous brosser, à la peinture rouge sang, l'une des facettes d'une société plus sauvage que le plus sauvage des animaux.
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