24 oct. 2023


 " Numéro deux "   de David Foenkinos   16/20

      Quand eu lieu le casting pour dénicher le jeune garçon qui allait endosser le rôle d'Harry Potter sur grand écran, pléthore d'acteurs en herbe furent auditionnés. A un moment il n'en resta plus que deux en lice ; on sait qui fut choisi, un certain Daniel Radcliffe, mais qu'advient-il de celui qui échoua sur la dernière ligne droite ? Comment a-t-il pu supporter puis accepter une telle déception ? Une vie entière peut-elle être hantée par un seul échec ?

      Il est non négligeable de se poser la question de ceux qui finissent éternellement deuxième, de ceux qui sont toujours dans l'ombre du vainqueur, de surcroît quand l'élu devient, par la force d'un marketing outrancier, une star internationale. David Foenkinos creuse cette idée, il sonde les méandres des tourments du perdant, il en ressort un roman à la fois terrible et consolateur.

      Tout d'abord on est ému à lire les aventures psychologiques et humaines du pauvre Martin Hill, on en est même bouleversé tant la situation semble inextricable : les sorties de romans puis de films alimentent une dépression latente. 

      Néanmoins, la réussite totale et la notoriété sont-elles réellement un saint Graal source de bonheur ? Est-ce un échec de vivre autrement, dans une certaine simplicité, une singulière sobriété ? En ces temps où chacun rêve de son moment de gloire sur les réseaux sociaux ou sur un média quelconque, le questionnement n'est pas anodin. La dictature du bonheur des autres est-elle enfin en voie de disparition ?

      En allant plus loin : est-il si négligeable de vivre un destin loin des feux de la rampe ? Les chemins que nous n'empruntons pas sont-ils assurément les meilleurs ? Rate-t-on inéluctablement sa vie si un destin facétieux nous fait suivre une voie moins reluisante qu'une autre ? Comme on le voit ce roman développe d'innombrables interrogations sur nous-même. Rien que pour cela, ce livre touche à universel. A l'universel de l'intime.


13 oct. 2023


 

HAIKU   Partie CLXXV

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Table de jardin

Le doux bruit de l'automne

Quand tombe une feuille



Sous les feuilles cuivrées

Un bataillon se lève

Mille champignons



La tombée des feuilles

Petit courrier végétal

Lettres d'automne



Vent coquin

Tout nu au jardin

le poirier sans feuille



Contemplation -

Sur un oreiller de feuilles

la course des nuages



 " Et nous c'est ainsi que nous vivrons " de Douglas Kennedy 11/20

      2045, depuis quelques années les Etats-Unis ont vécu une seconde guerre de sécession ; désormais le pays est coupé en deux. D'un côté la Confédération unie, pays théocratique regroupant les républicains ou les conservateurs actuels, s'établissant principalement au centre de l'ancien pays ; de l'autre la République unie, établie elle sur les côtes Est et Ouest, est une démocratie dirigée par une sommité des nouvelles technologies, où les libertés sexuelles, religieuses et culturelles sont privilégiées, par contre, la surveillance générale est une règle absolue,  Parmi ces habitants, une femme : Samantha Stengel travaille pour la sécurité de son pays, un jour, son chef lui révèle un secret : elle a une demi-sœur nommée Caitlin. Comme elle, elle est espionne, mais de l'autre côté de la frontière pour l'inquiétante et funeste théocratie.

      Pour la première fois, Douglas Kennedy touche au roman dystopique. Si on sait dessiller ses yeux, il est clair qu'actuellement nous vivons une guerre culturelle entre deux Amériques, deux visions du monde, deux sensibilités aux antipodes. Entre les partisans de Biden et ceux de Tramp, il y a plus de différences que de similitudes, d'où l'idée de pousser le bouchon plus loin et de jouer la carte de la fracture effective. En bon anticipateur, l'auteur nous dresse un tableau glaçant où en démocratie, l'état n'ignore plus rien de ses sujets, même leur vie privée ; et où en théocratie, l'on envoie les blasphémateurs au bucher et où l'avortement et l'adultère sont interdits et donc sévèrement punis. Actuellement, ce discours existe déjà dans le discours des fondamentalistes républicains. Au travers des lignes de ce roman, Douglas Kennedy tire la sonnette d'alarme et nous livre toute son angoisse devant cette société si divisée.

      Certes, avec une belle aisance et une redoutable efficacité l'auteur pose le problème par le truchement de ses protagonistes, néanmoins, l'histoire vire vite au classique roman d'espionnage, certes, avec des moyens ultra-modernes, mais c'est tout. Une fois, les bases du roman posées j'aurais aimé aller plus loin dans la prospective entre les deux pays ennemis. Peut-être suis-je trop exigeant. En effet, à par le twist de la dernière partie auquel je m'attendais un peu, je reste sur ma faim en lissant le mot fin.

      En vérité, le sujet de la division des Etats-Unis ne sert que de décor pour l'intrigue. Je ressens véritablement un manque criant de substances futurologiques. Que l'imagination fertile de Douglas Kennedy aille plus loin, mais non, on en reste cruellement là. Grand dommage !


4 oct. 2023

 Petit aperçu du jardin automnal.

Partie 1


Même les topinambours font des fleurs : la preuve !



Aïe aïe, une tomate cerise coincée en plein grillage !



Quand une courge butternut va se nicher, par deux mètres de hauteur, dans un cotonéaster.



Quand les framboisiers remontants sont généreux en octobre.



Discussion amoureuse entre monsieur et mademoiselle papillon.



Sous les tropiques ? Que nenni ! Je suis toujours en Normandie sous un albizia qui déploie toute son élégance.



Autre élégance : celle du phlox au crépuscule proposant mille nuances de blancs.



Miam, miam, les futurs céleris-raves râpés.



Qui dit automne dit champignon, je n'ai pas réussi à l'identifier péremptoirement.


Belle courge musquée par beau soleil déclinant.


Belle assiette de crudités et fruits pour se dire à bientôt.


3 oct. 2023


 " L'appel du néant "   de Maxime Chattam  15/20


      Pour ce troisième tome des enquêtes glaçantes de Ludivine Vanker, lieutenant de gendarmerie à la section de recherche de Paris, l'auteur change radicalement de braquet, au lieu de se concentrer uniquement sur l'arrestation d'un sérial killer (rassurez-vous le sordide est toujours bien présent), il bifurque vers les méandres du terrorisme. Ainsi, le psychopathe sert de mise en bouche, il appâte le chaland, mais derrière lui se dresse l'insaisissabilité d'un cerveau djihadiste. En effet, en coupant mortellement les ponts de tous ceux qui pourraient le relier à lui, cet extrémiste ne donne que très peu de prise à de la DST. 

      En dehors du thriller classique, mais toujours aussi terrifiant, Maxime Chattam cherche à comprendre le cheminement qui pousse certains musulmans à devenir des extrémistes, il nous donne matière à réflexion, notamment en faisant référence à l'attitude de l'occident face au mode de vie oriental. En effet, beaucoup de musulmans s'estiment agressés par les pays riches qui règnent en maître absolu sur la planète. Ainsi, des passages tiennent plus de la psychologie que du thriller : traiter la forme autant que le fond, voilà ce que Maxime Chattam apporte de plus à la littérature de l'effroi.

      L'appel du néant est un roman différent, un roman qui colle à l'actualité, un roman qui nous propose une réflexion sur nous-même. Certes, les habitués d'un Chattam qui terrifie pourront être désarçonnés, mais ce que nous propose Maxime est loin d'être dénué d'intérêt, très loin même.