27 juil. 2015


" Les apparences " de Gillian Flynn  15/20



Amy et Nick forment apparemment un couple modèle et idyllique : ils sont beaux, ils s'aiment, ils habitent Manhattan et tout leur réussit. Cependant... la crise financière se profile à l'horizon, l'un puis l'autre vont subir les affres du licenciement. 

Afin de se rapprocher de parents malades, Nick emmène Amy s'installer dans le Missouri. Avec sa soeur Margo, il devient le patron d'un bar, mais la vie a perdu son charme, petit à petit les liens avec sa femme se distendent, leur amour s'étiole... jusqu'à un certain 5 juillet où Amy disparaît !

L'enquête policière en vient vite à suspecter Nick, tant il semble peu loquace sur les interrogations légitimes des inspecteurs. La belle image du couple se déchire fatalement, pour laisser apparaître des nuances, des failles, de plus en plus prononcées de noirceur.

Impossible d'en écrire plus sans déflorer les rouages de cette mécanique implacable et admirablement bien ficelée. 

Gillian Flynn se plaît avec espièglerie à nous balader d'un sentiment à l'autre, jusqu'à nous rendre schizophrènes. Que faut-il penser de cette disparition ? Qui ment ? Et pourquoi ? Quels sont leur secret ? Cette frénésie d'interrogations est augmentée par le récit à deux voix que nous propose l'auteur : D'abord la voix de Nick qui suit le cours des événements à partir du jour de la disparation de sa femme, puis comme une réplique, un contrepoids, c'est celle d'Amy, qui par le truchement de son journal intime, peu à peu dissèque ce qu'a été sa vie de couple. Chacun dévoilant avec parcimonie le véritable visage de leur union, puis, telle une montée délétère de manipulations, un pic paroxysmique est atteint, jusqu'à l'impensable !

Je dois reconnaître que l'intrigue est d'un machiavélisme toxique à souhait. Cependant je me demande comment une histoire aussi sordide a pu germer dans la tête d'une femme ? Ah... mystère insondable de l'inspiration ! C'est tellement malsain, tordu, qu'il vaut peut-être mieux ne pas connaître ses origines !

L'atmosphère de Carthage, la ville où se passe l'histoire est parfaitement restituée. Posée au bord du Mississipi, elle représente toutes ces villes vidées d'une partie de leur population par l'assassine récession économique qui signe l'arrêt de mort de tant d'entreprises et par ricochet, des centres commerciaux, qui révèle petit à petit un paysage décharné, déchiré, où vite la nature reprend ses droits, comme si l'homme n'avait été qu'une parenthèse, tout sauf enchantée !

Malgré tout, la narration avance lentement (surtout au début), par petites touches, comme le tableau d'un peintre qui pratique l'art du pointillisme, d'où cette impression de temps mort ; il faut tourner beaucoup de pages pour se rafraîchir d'éléments servant à l'intrigue, même si on peut assurément deviner un ou deux rebondissements.

Bref, c'est un roman pour le moins paranoïaque, donc stressant, qui par le truchement de ces péripéties jette un voile noir sur ce que peut être aussi parfois : un couple ! En effet, après cette lecture glaçante, qui s'empêchera d'examiner son propre couple à l'aune de celui du roman ?

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