25 nov. 2025

 " Les étoiles de Compostelle "   de Henri Vincenot   15/20


      Durant le XIIIème siècle, il existait des communautés vivant à l'écart du monde et chargées par le seigneur local de transformer, en 20 ans, une forêt en un terrain fertile. On les appelait les essarteurs. Jehan de Tonnerre, un jeune homme de 15 ans, sauvage et farouche, était de ceux-là. Un jour dans la vallée, sa curiosité aidant, il est attiré par les prémisses du chantier d'une abbaye cistercienne. Sa vie va en être entièrement chamboulée. Bientôt, le voilà embauché par le maître des compagnons menuisiers. Magnifique parcours initiatique.

      Tout le roman est constellé d'interactions entre les religions celtique et chrétienne liées à une singulière réflexion autour de  l'élaboration de l'art roman et l'art gothique. Rien dans une construction religieuse n'est là pas hasard, tout répond au spirituel, au symbolisme, au sens profond de ce qui nous entoure, au sens philosophique de la vie et aux mathématiques. Ainsi, naturellement dans l'Histoire européenne, apparaissent les compagnons, ces artisans bâtisseurs (charpentiers, tailleurs de pierre), hautement compétents, passionnés de leur métier et fiers de leur travail. Ce récit est un hymne aux métiers manuels, d'ailleurs l'auteur déclame : " La civilisation qui méprise la main est vouée à la catastrophe...". Il prend aussi son temps pour nous expliquer la technique des constructions à partir de la géométrie.

      Ainsi, la lecture s'avère érudite et enrichissante, entre les lignes Henri Vincenot cherche l'union de toutes choses, mais également l'altruisme, la paix et enfin le bonheur des peuples, tous unis derrière la capacité intellectuelle, créative et physique des hommes de bonne volonté. Une vague d'universalité traverse et transcende l'ensemble. L'harmonie totale comme dessein ultime.

      La plume de l'auteur ne cherche jamais la simplicité, elle nous nourrit d'innombrables mots archaïques datant du moyen-âge, néanmoins grâce à eux, l'histoire prend chair, on y croit. On suit avec empathie le cheminement initiatique de Jehan Tonnerre sur les routes d'une France où naissent de partout monastères, églises, abbayes ou cathédrales. Chaque site est l'occasion de parfaire un savoir souvent gardé secret. D'ailleurs, derrière ces activités de construction une nouvelle société se forme : celle de la franc-maçonnerie.

      J'ai également été séduit par la lucidité de l'auteur, n'hésitant pas à faire dire à certains personnages la vérité sur les croisades, ces guerres saintes servant de prétexte à toutes abominations ou vols.

      Par contre, Henri Vincenot est le roi de l'anachronisme. Nous sommes sensés être au XIIIème siècle, or, intervient durant l'histoire la mort d'Abélard en 1182 ; le prêche de Bernard de Clairvaux en 1145, puis sa mort en 1153, sans oublier l'incendie de la cathédrale de Chartres en 1194, etc. Cherchez l'erreur ! 

      En résumé, ce roman historique nous fait revivre une époque phare à la charnière entre l'art roman et l'art gothique, une époque d'espérance où tout semblait possible, une époque où l'artistique a eu ses lettres de noblesse. Enfin j'espère que ce roman fera taire tous ceux qui disent encore qu'il ne s'est rien passé au moyen-âge, alors que tant de bouleversement ont eu lieu, autant religieux qu'architectural, autant intellectuel que philosophique. A bon entendeur, salut !


22 nov. 2025



 Petit aperçu du jardin automnal 2025

Partie 2



Avec les températures automnales, la sauge coccinelle regagne une nouvelle jeunesse.


Petit à petit, en prévision des prochaines gelées, le jardin potager se dissimule sous une couverture de paille.



Comme un cache-nez autour des pieds de blette.


Inespérés, mais néanmoins bienvenues mes derniers choux-fleurs de l'année.


Voici l'époque où la mâche garnie nos assiettes de novembre.



Les toutes dernières tomates prolongent ainsi une saison bien généreuse en solanacées.



Les dipladénias prennent leur quartier d'hiver sous une première serre.



Un dernier frelon dans une première fleur de camélia.



Dégustation de mon dernier melon, soyons honnête, il manque un peu de sucre !



Toujours la magnificence de ce pied de dahlias, avant les premiers gels.



Idem pour ces lys Incas.


On se quitte avec cette branche de cotonéaster, pleine de baies rouges si appréciées des oiseaux pendant la période hivernale.

A bientôt.


 " Indiana "   de George Sand   14/20


   En Octobre 1827, dans un château situé aux environs de Paris, sont réunis autour de la cheminée trois personnages : Une jeune et belle créole de 19 ans du nom d'Indiana ; son mari, le colonel Delmare, un vétéran des armées napoléoniennes, de quarante ans son aîné ; et Ralph, l'ami fidèle de la famille et cousin de la chatelaine. L'intrusion d'un troisième homme dans ce trio, viendra semer le trouble dans l'esprit d'Indiana. Il s'agit de Raymon de Ramière, un royaliste trentenaire, beau de sa personne, à la faconde plaisante. Il sera l'élément romanesque qui bouleversera l'existence morose d'Indiana ; il faut dire que Raymon est un séducteur opportuniste, d'ailleurs il s'est introduit dans la propriété pour assouvir sa faim de conquête avec la dame de compagnie d'Indiana : Noun, mais en voyant la jeune chatelaine, il changera immédiatement de cible. Un Don Juan vous dis-je.

      La trame est plantée, suivront d'innombrables échanges verbaux ou épistolaires entre la belle et bellâtre. Car Indiana est une femme malheureuse, qui vit sous la férule d'un homme sans esprit et sans éducation, elle subit une violence verbale au point d'envisager la mort comme une libération. Elle a toujours vécu en se posant mille questions sur sa condition de femme et ses possibilités d'avenir. Le surgissement de Raymon, dans sa triste vie, rebat les cartes de futurs possibles. Cependant les carcans de la société sont si prédominants, si influents qu'Indiana fait mille aller-retour dans ses pensées. De trop nombreuses pages relatent ces zigzags intellectuels, naviguant entre mille réflexions et rendant l'ensemble assez poussif.

      Le personnage de Ralph est attachant par son effacement volontaire dû à tout gentleman. Il séduit par sa sensibilité extrême et sa grande dignité morale. De surcroît, Ralph est un idéaliste qui rêve de république en opposition avec les deux esprits calculateurs et pragmatiques que sont ceux du colonel Delmare et de Raymon. Ainsi, ce roman est plus politique qu'il n'y paraît, dessinant les différentes visions d'avenir pour la France.

      Au travers de ce premier roman publié, George Sand dénonce l'injustice et la barbarie des lois qui régissent l'existence des femmes, non seulement dans le mariage, dans la famille, mais aussi dans la société. Elle appuie sur l'iniquité de traitement entre hommes et femmes, dont celle-ci, sacrifiées sur l'autel d'un patriarcat tout puissant, telle une loi immuable.

      Ecrit en 1832, cette étude des mœurs aurait méritée un certain élagage car l'ensemble m'a semblé parfois indigeste, même si le fond du roman est légitime, la forme est malheureusement trop verbeuse ou sur-écrite.

   A noter qu'il est sorti en 2023 une version en bande dessinée, signée Bouilhac & Catel aux éditions Dargaud, qui retranscrit très fidèlement le roman. Avec de surcroît un prologue et un épilogue mettant en scène Gorge Sand parlant d'Indiana.


13 nov. 2025


" Les partisans " Kessel et Druon, une histoire de famille. De l'académicienne Dominique Bona   18/20

      L'autrice, nous fait revivre deux légendes de la littérature française, celles de deux hommes puissamment imbriqués dans l'Histoire du XXème siècle. A noter que Joseph Kessel est l'oncle Maurice Druon. En décembre 1942, ils quittent la France pour rejoindre le général De Gaulle à Londres. L'année suivante, ils signeront les paroles de l'hymne de la Résistance, le fameux Chant des partisans. A partir de ces faits, Dominique Bona nous déroule le tapis de leur vie. Une vie tournant autour de leur passion commune : l'écriture. Pour les plus jeunes, je rappelle que Kessel a signé notamment : Le lion et Les cavaliers, quant à son neveu Druon on lui doit la grande fresque : Les rois maudits.

      Je tiens à saluer le colossal travail de documentation nécessaire à l'élaboration de ce livre si érudit. Sous sa plume élégante, elle nous fait revivre la vie de personnages que le temps a figé dans un passé poussiéreux. Comme elle écrit avec son cœur, on ressent véritablement les liens familiaux qui cimentent la relation entre Kessel et Druon, tout en tendresse et en fidélité, jamais la moindre once de jalousie ne viendra ternir leur binôme. Ce sont des personnages hors-normes, débordant constamment du cadre par leur caractère excessif, les poussant à agir quand d'autres seraient paralysés par la peur. Cela vaut pour leurs attitudes en temps de guerre, pour leurs amitiés, comme pour leurs vies amoureuses. De vrais baroudeurs de la vie.

      Certes, Joseph Kessel, l'aventurier, le bourlingueur, le journaliste, préfère nettement voyager dans les pays de conflits, y dialoguer avec toutes cultures, s'immerger dans les bas-fonds, y interroger les pauvres, et écrire sur le vif, sans se préoccuper des avis extérieurs ; paradoxalement, Maurice Druon est plus un homme plus mesuré, d'aspiration classique, voyageant peu, attaché à son confort et cherchant la reconnaissance de l'élite aristocratique.

      En écrivant ces deux biographies croisées, Dominique Bona laisse une belle part aux femmes, celles, nombreuses, qui ont su séduire un temps l'un des deux monstres sacrés. Notamment Germaine Sablon, une femme forte, courageuse, qui a su tenir tête à plus d'un, d'ailleurs elle entre dans un réseau de résistance bien avant Kessel et Druon. L'autrice remet aussi l'église au centre du village en joignant le nom d'Anna Marly à la création du Chant des Partisans. De même, loin de toute hagiographie imbécile, elle donne une dimension humaine à tous les protagonistes, révélant leurs qualités et leurs travers avec toujours en toile de fond le contexte historique. 

      Ainsi, une partie de l'histoire du XXéme siècle reprend forme dans nos mémoires, avec certaines séquences fortes, comme notamment celles sur le procès de Nuremberg ou celui de Eichmann en Israël, couvert par Kessel pour le journal France-Soir d'un certain Pierre Lazareff.

      L'ensemble fourmille de renseignements judicieux, d'anecdotes, cela pétille d'une masse considérable d'informations (peut-être trop) et d'une fine analyse psychologique de nos deux "héros". Bref, il s'agit là d'un travail honorable, d'une bible, qui nous fait revivre une époque révolue où des esprits volontaires pouvaient déplacer des montagnes.


5 nov. 2025

" La promesse d'Odessa " de Natacha de Rosnay   6/10

      A la fin de sa vie, Zanaïda a demandé à son arrière-arrière-petite-fille, Natacha, d'écrire un jour toute l'histoire de sa vie. Natacha a tenu parole, c'était la grand-mère de la célèbre autrice Tatiana de Rosnay.

      L'histoire de la vie de Zanaïda aurait pu être passionnante, malheureusement chaque situation est survolée, le compteur du temps s'accélère, rien n'est vraiment traité ; franchement, j'ai eu l'impression de lire une longue bande-annonce d'une série sur Netflix !

      Cette Russie du XIXème est uniquement observée du point de vue de la bourgeoisie ; le peuple qui souffre n'a jamais droit à la parole, seul compte l'amour, les belles robes, un mariage réussi, une descendance digne de ce nom, un amant ici ou là, des futilités sans nom, bref, la ferme volonté de profiter d'une vie confortable et distrayante dans un monde où les prémisses d'une rébellion sont en germe. Bien sûr, on entrevoit le destin de la Russie au travers de quelques rappels historiques, mais si ténus, si ridicules.

      A part Zinaïda, aucun personnage n'existe vraiment, trop esquissé, et puis il y en a tellement, presque un nouveau à chaque page. C'est simple, l'autrice balaye 70 ans d'une famille sur quatre générations en 280 pages ! Une aberration. C'est dommage, car à la vue de toutes les péripéties incroyables qu'à vécue cette famille (si toutefois tous les éléments sont vrais), cela aurait mérité un bien meilleur traitement, digne justement de cette incroyable épopée familiale.

      Un roman facile à lire, néanmoins vite oublié, pourtant il y avait amplement matière.


2 nov. 2025

 Petit aperçu du jardin automnal 2025

Partie 1



Typique des récoltes d'automnales : la châtaigne, dont la bogue me fait songer à un bébé hérisson.



Avant les premiers gels, ce pied de cosmos envoie ses dernières fleurs vers le cosmos ; d'où leurs noms !



De même pour ce pied de dahlias aux fleurs follement lumineuses.



Quelques timides œillets viennent réveiller ma plate-bande d'un puissant rose...



... à deux pas d'un pied d'œillet d'Inde fleurissant inlassablement depuis six mois.



Plus loin, une splendide fleur d'ipomée jette son bleu nuancé à travers une frondaison de vert.



Les pluies de l'automne ont réveillé cette sauge assommée par les chaleurs estivales.



Au potager, mes dernières laitues Appia ne demandent qu'à honorer nos assiettes de novembre.



Comme l'année dernière, mes pieds de chayottes attendent sagement l'automne pour faire grossir ses fruits. Je rappelle qu'il s'agit d'une cucurbitacée.



Autre symbole des légumes d'hiver : le fameux radis noir, ici en version toute ronde.



On se quitte avec cette belle fleur de topinambour, défiant le ciel d'azur.

A bientôt.