" Les partisans " Kessel et Druon, une histoire de famille. De l'académicienne Dominique Bona 18/20
L'autrice, nous fait revivre deux légendes de la littérature française, celles de deux hommes puissamment imbriqués dans l'Histoire du XXème siècle. A noter que Joseph Kessel est l'oncle Maurice Druon. En décembre 1942, ils quittent la France pour rejoindre le général De Gaulle à Londres. L'année suivante, ils signeront les paroles de l'hymne de la Résistance, le fameux Chant des partisans. A partir de ces faits, Dominique Bona nous déroule le tapis de leur vie. Une vie tournant autour de leur passion commune : l'écriture. Pour les plus jeunes, je rappelle que Kessel a signé notamment : Le lion et Les cavaliers, quant à son neveu Druon on lui doit la grande fresque : Les rois maudits.
Je tiens à saluer le colossal travail de documentation nécessaire à l'élaboration de ce livre si érudit. Sous sa plume élégante, elle nous fait revivre la vie de personnages que le temps a figé dans un passé poussiéreux. Comme elle écrit avec son cœur, on ressent véritablement les liens familiaux qui cimentent la relation entre Kessel et Druon, tout en tendresse et en fidélité, jamais la moindre once de jalousie ne viendra ternir leur binôme. Ce sont des personnages hors-normes, débordant constamment du cadre par leur caractère excessif, les poussant à agir quand d'autres seraient paralysés par la peur. Cela vaut pour leurs attitudes en temps de guerre, pour leurs amitiés, comme pour leurs vies amoureuses. De vrais baroudeurs de la vie.
Certes, Joseph Kessel, l'aventurier, le bourlingueur, le journaliste, préfère nettement voyager dans les pays de conflits, y dialoguer avec toutes cultures, s'immerger dans les bas-fonds, y interroger les pauvres, et écrire sur le vif, sans se préoccuper des avis extérieurs ; paradoxalement, Maurice Druon est plus un homme plus mesuré, d'aspiration classique, voyageant peu, attaché à son confort et cherchant la reconnaissance de l'élite aristocratique.
En écrivant ces deux biographies croisées, Dominique Bona laisse une belle part aux femmes, celles, nombreuses, qui ont su séduire un temps l'un des deux monstres sacrés. Notamment Germaine Sablon, une femme forte, courageuse, qui a su tenir tête à plus d'un, d'ailleurs elle entre dans un réseau de résistance bien avant Kessel et Druon. L'autrice remet aussi l'église au centre du village en joignant le nom d'Anna Marly à la création du Chant des Partisans. De même, loin de toute hagiographie imbécile, elle donne une dimension humaine à tous les protagonistes, révélant leurs qualités et leurs travers avec toujours en toile de fond le contexte historique.
Ainsi, une partie de l'histoire du XXéme siècle reprend forme dans nos mémoires, avec certaines séquences fortes, comme notamment celles sur le procès de Nuremberg ou celui de Eichmann en Israël, couvert par Kessel pour le journal France-Soir d'un certain Pierre Lazareff.
L'ensemble fourmille de renseignements judicieux, d'anecdotes, cela pétille d'une masse considérable d'informations (peut-être trop) et d'une fine analyse psychologique de nos deux "héros". Bref, il s'agit là d'un travail honorable, d'une bible, qui nous fait revivre une époque révolue où des esprits volontaires pouvaient déplacer des montagnes.
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