29 nov. 2021

 



HAÏKU   Partie CLX

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à la frontière polonaise

jeu d'échecs européen

petits pions dans le froid



tragédie en Manche

vingt-sept migrants noyés

humains vivant l'inhumain



famine à Madagascar

enfants au visage émacié

le monde prépare Noël



le paradis sur terre

un monde sans douleur

la naïveté de Noël



ô monde égocentrique

incapable de pensées nobles

autodestruction programmée



22 nov. 2021


 " La fabrique des salauds "   de Chris Kraus   17/20

    

      Tout débute en 1974 dans une chambre d'hôpital à Munich, dans une République Fédérale Allemande apparemment pacifiée. Deux êtres, aux portes de la mort, vont discourir ; l'un, Konstantin Solm, un vieil homme avec une balle nichée dans la tête, veut libérer sa conscience lourdement plombée, l'autre, un jeune hippie pacifiste voit en chaque individu un être formidable. Alité, il n'a rien d'autre à faire qu'à écouter le récit de Solm qui s'avérera des plus glaçant ! Il débute par son enfance dans les années 20 à Riga, en Lettonie, sa carrière dans l'Allemagne nazie, puis comme espion dans la toute jeune RFA. Konstantin vivra des relations compliquées avec son frère ainé, Hubert, oscillant entre amour et haine. Leur amour commun pour leur sœur adoptive, Ev, les portera en haut de l'Olympe avant de les précipiter dans les gouffres insondables du tourment. Ce récit va épouser tout un pan du XXème siècle de Riga à Moscou et d'Auschwitz à Tel Aviv.

      Partant de faits réels, Kris Klaus convoque la littérature et la nature humaine dans une danse folle entre le bien et le mal, entre la vie et la mort ; l'ensemble soumis aux soubresauts d'un siècle apocalyptique.

      Dans le violent désordre que furent les années 30 et 40, les deux frères Solm obéirent plus à leur instinct de survie qu'à leur conscience humanitaire ; dans ce chemin tortueux bordé de traitrise et de sang, peu à peu, au fil de l'innommable, ils ne peuvent rejoindre que leur lieu de crucifixion psychologique et physique, seul moyen expiatoire à leur inqualifiable comportement.

      Dans le dessein de contrebalancer l'élan mortifère des deux frères, prêts à tout pour survivre en conservant un vrai rôle dans l'Allemagne nazie et même après, le personnage féminin d'Ev est essentiel, il est notre humanité, il est le seul regard bienveillant extérieur, il est la probité, il est le jugement face à l'hypocrisie, il est l'oxygène qui permet une lecture digne, tant l'ignominie culmine partout. De surcroît, ce prénom biblique se veut le symbole de la femme mythique, idéale et pure ; l'auteur tisse également un lien avec la pomme mordue en couverture, nous susurrant ainsi perfidement à l'oreille que le mal (le nazisme), au tout début, à une image alléchante et séduisante, avant de devenir un monstre, mais il est déjà trop tard : la pieuvre noire a déjà étendu ses tentacules partout.

      Le personnage de Konstantin est terriblement ambigu, par lâcheté il devient nazi, par amour il devient le pire des traîtres. Il est si prompt à justifier ses actions, à s'inventer de toutes pièces un équilibre spirituel, car il est entièrement dépourvu de sens moral. Le pire de tout étant qu'il est foncièrement persuadé d'être un type bien, comme tant d'autres qui aiment s'abandonner à la douce chaleur de leur propre vérité, mus par une foi fallacieuse. 

      L'un des aspects les plus sidérant du roman, celui qui fait écarquiller nos yeux, est d'apprendre le nombre effarant d'SS, qui sentant le vent de l'Histoire tourner, se sont dépêchés de nouer des contacts avec les services secrets alliés, afin de souscrire une assurance-vie grâce à la mine d'informations qu'ils purent fournir, notamment sur l'URSS. Car déjà en filigrane, les prémices de la guerre froide étaient en gestation. Ainsi, sur l'autel des raisons bassement géostratégiques difficilement admissibles pour le commun des mortels, le recyclage des anciens dirigeants nazis allait bon train. Le monde secret du renseignement ne s'embarrasse nullement de principes moraux. Dès lors, une question se pose : qui, du salopard nazi ou de son protecteur opportuniste, est le plus abject ? Ou, sous couvert du principe fallacieux de liberté, tout, y compris l'innommable, est-il permis ?

      Afin de nous faire parcourir l'ensemble de sa sombre saga historique où la géopolitique est la nef des fous, Chris Klaus jongle délicatement entre humour et cynisme. Autre paradoxe : sous une plume élégante, la lecture coule paisiblement le long des rives boursouflées des arêtes de l'Histoire.

      Peut-être faut-il regretter quelques longueurs dans la dernière partie, comme-ci ce marathon littéraire de plus de 1 000 pages était assailli par un manque de carburant en fin de parcours. Mais quel livre est parfait ?

      Ce roman tient de la même veine du Goncourt 2006 : Les bienveillantes de Jonathan Littell. Il se veut glaçant et il l'est.

      La fabrique des salauds est un grand roman sur l'ambivalence et la contradiction qui nichent en chacun de nous. Oscillant entre victime et bourreau, il interpelle, il interroge comme doit le faire tout bon roman.

 

18 nov. 2021


 

" C'est arrivé la nuit "   de Marc Lévy   15/20


      Sur la grande toile d'internet, neuf hackers ou plutôt neuf robins des bois sont amis. Mais ils ne se sont jamais rencontrés physiquement pour la sécurité de chacun. Ils déjouent et dénoncent, grâce à leur talent en codage informatique et autres, les fraudes et les abus des fameux délinquants en cols blancs comme les multinationales, les hommes politiques corrompus, les grands dirigeants trempant dans des affaires nauséabondes, la fachosphère, etc. Voguant entre illégalité et dénonciations frauduleuses, ils risquent de lourdes peines de prison, si ce n'est plus. Pourtant, pour eux, seule la vérité compte, à n'importe quel prix.

      Inspirée de faits réels, cette histoire surfe sur l'air du temps en nous propulsant au cœur des nouvelles technologies, au travers de nos sociétés hyperconnectées qui permettent une pléiade d'abus, dont bien peu d'utilisateurs sont conscients.

      Ainsi, Marc Lévy rend hommage à tous ces hommes et femmes de l'ombre, virtuoses du Web, qui ont fait le choix de vivre dans la clandestinité pour aller au bout de leurs convictions. Sacrifiant leur liberté pour que les autres puissent vivre dans un monde un peu plus juste, un peu plus honnête. Parfois, je ne peux m'empêcher de songer à ceux qui se battent incognito au péril de leur vie pour transmettre des vérités dont beaucoup de gens ne se soucient guère. Être chevaleresque pour la beauté du geste ou parce qu'ils ne peuvent pas faire autrement ?

      L'auteur nous révèle comment une organisation peut aider un parti politique à influencer notablement le résultat d'une élection, surtout quand l'écart entre les deux candidats est faible ; ou comment des firmes pharmaceutiques s'entendent, en toute illégalité, pour faire grimper le prix de certains médicaments ou de traitements thérapeutiques.

    Bien que le roman soit haletant, un vrai page-turner, il nous laisse sur notre faim. Naturellement, une suite, ou même plusieurs, ne saurait tarder. Néanmoins, j'ai eu l'impression d'avoir été floué, de ne pas en avoir eu pour mon argent, que l'on m'en a soustrait un bout, ou tout simplement qu'il manque des pages ! Bah, certainement une conséquence du côté addictif de ce récit.

      Habituellement, je me méfie des romans de Marc Lévy, trop fluets et trop évanescents ou trop parfumés à l'eau de rose. Cependant, certains de ses livres dénotent avec sa production habituelle. J'avais déjà eu cette impression avec l'excellent Les enfants de la liberté, comme quoi il faut se méfier des a priori.

  

15 nov. 2021

 Suite des réalisations pâtissières un rien artistiques :






























                           Merci aux fidèles, et à bientôt pour d'autres suites !


7 nov. 2021


" Histoires de la nuit "   de Laurent Mauvignier    7/20


      A la gendarmerie de La Bassée, un bourg perdu dans le centre de la France, une artiste peintre plus toute jeune et autrefois parisienne, Christine, vient demander l'avis de la gendarmesque au sujet des lettres anonymes qui échouent régulièrement dans sa boîte aux lettres. Christine habite un hameau, ses voisins immédiats sont Patrice et Marion, vivant avec leur charmante fille, Ida, âgée de 10 ans. Patrice est agriculteur et sa femme travaille dans une imprimerie.

      Ce jour-là, on va fêter les 40 ans de Marion. Au fur et à mesure des préparatifs, une angoisse apparaît, des hommes viennent rôder autour du hameau, et le chien de Christine ne répond plus à ses appels...

      L'idée du roman repose sur une lente montée de la menace, qui se cristallise enfin pour s'achever dans l'hémoglobine qu'un Tarantino ne serait renier. Mais cela en fait-il un excellent roman pour autant ?

      J'aurais envie de dire : Tout ça pour ça ! A entendre les louanges et les critiques dithyrambiques d'une certaine presse, je m'attendais à une révélation sur le fond et sur la forme, quelle déception ! Le fond n'a rien d'original dans la mesure où une impression de déjà vu et de déjà lu vient refroidir mes ardeurs de lecteur avide justement d'originalité, d'autant plus que deviner la fin est d'une facilité déconcertante. Quant à la forme : ces longues phrases interminables, qui s'arc-boutent sur les sentiments mitigés des protagonistes, ont une importance non négligeable dans la première partie du livre, cependant, passées les 300 pages, on a franchement envie que l'histoire s'accélère, que Laurent Mauvignier arrête d'enfiler des perles, eh bien non, il continue à nous faire patauger dans une mélasse verbale sans fin qui m'a petit à petit irrité au point de sauter des lignes, puis des pages, en ne perdant à aucun moment le fil de l'intrigue tant elle est délayée dans une folle évanescence.

      Dès lors, comment un sentiment d'empathie peut-il naître ? Même les scènes qui se voudraient d'effroi, perdent de leur force noyées dans une bouillie de mots grimpant les uns sur les autres à l'effigie d'une austère déliquescence.

      Au final, ce soi-disant polar social et rural se mue en une sorte de dissertation ultra bavarde où le style écrase la moindre velléité, saccageant d'un pied assassin les fragiles petits plants d'excentricité qui auraient pu sauver l'histoire de l'abysse dans lequel l'auteur l'a volontairement précipitée.


2 nov. 2021

Nouvelles réalisations pour les gourmands :























A très vite pour de folles originalités !