" Blizzard " de Marie Vingtras 17/20
A peine le temps pour Bess de lâcher la main de l'enfant pour refaire son lacet, que déjà, celui-ci a disparu, avalé par la tempête de neige soufflant au coeur de l'Alaska.
Dès l'incipit, le ton est donné ; un huis clos à ciel ouvert s'amorce, perdu au bout d'un monde glacial. A tour de rôle chaque protagoniste va intervenir autour des heures suivantes le temps de tout petits chapitres. Les voix s'entremêlent, reconstruisant le passé de chacun, comme une mosaïque qui se reconstituerait sous nos yeux. Les drames individuels se chevauchent, chacun cherchant à résoudre ses problèmes insolubles. La vie ne fait pas de cadeaux, mais des fragments de lumière peuvent jaillir ici ou là.
Avec ce récit morcelé et bouleversant, Marie Vingtras vient nous interpeller sur l'absurdité de nos croyances, sur les non-dits insoupçonnables, sur nos traumatismes et sur une hypothètique possibilité de jours meilleurs.
Sa plume ne s'encombre pas de descriptions interminables, elle va directement là où résident nos souffrances, la psychologie des personnages tient lieu de décor. Etant un lecteur assidu de la collection Gallmeister il me manque une plus grande présence de la nature, silencieuse, oppressante, inhospitalière mais effroyablement belle.
Naturellement, le titre du roman ne fait pas seulement allusion aux phénomènes météorologiques, mais surtout à nos douloureuses souffrances morales. Chacun pourra s'y reconnaître : comment faire un bon choix de vie ? D'ailleurs, avons nous vraiment le choix ? Le déterminisme social est-il toujours le plus fort ? Comment lutter contre nos instincts primitifs ? Comment vivre avec une culpabilité qui ronge ?
En lisant cette autrice, on ressent une sensibilité fortement imprégnée de la culture américaine, avec toute la violence intrinsèque que cela induit. Derrière les monologues ou confessions appliquées des protagonistes, je n'ai pu m'empêcher de voir l'ombre de l'avocate, profession que Marie Vingtras exerce en dehors de l'écriture.
Ce roman restera gravé dans nos mémoires de lecteurs par sa construction façon puzzle et par l'équilibre instable des innombrables innocences perdues.
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