Trois " sauvages " à Rouen !
Au début de la Renaissance, l'histoire de France mais surtout de l'Europe, prit une dimension inédite avec la découverte de l'Amérique. Ce contact avec d'autres civilisations marquèrent les esprits, d'abord par le choc d'apprendre qu'à l'ouest un gigantesque continent venait d'être mis à jour, puis par les possibilités de régénérescence offertes à la vieille Europe. Vite, les grandes nations européennes, pressées de tirer profit de ces territoires inconnus mirent sur pied des expéditions coloniales. Les colonisés ignoraient combien leur coûterait à long terme ce contact perfide.
Débuta alors une ère de commerce, de corruption, d'exploitation outrancière, qui accélérera le déclin et la ruine de ces civilisations du Nouveau Monde. D'ailleurs Montaigne, conscient du déséquilibre que le contact entre deux mondes à des stades différents de leur évolution allait inévitablement produire, remit en question le désir de vouloir absolument s'immiscer dans la culture d'autrui, soit-disant pour son bien, c'est ainsi qu'il fut l'un des premiers à censurer à l'époque le colonialisme.
Cependant, afin de contrebalancer le jugement hâtif et arrogant voire méprisant, que l'Européen pouvait avoir sur ses peuplades dîtes " primitives", il est intéressant de connaître un fait qui eut lieu en l'an de grâce 1562, à Rouen.
Il s'agit d'une rencontre presque anachronique entre d'une part : le Roi de France Charles IX (alors âgé de 12 ans) accompagné de Montaigne, et d'autre part de trois indigènes, justement issus du Nouveau Monde. En effet, depuis 1555 le chevalier de Villeganon s'était implanté dans la baie de Rio de Janeiro, afin de coloniser cette région appelée La France antarctique. Et lors des multiples voyages de retour, des hommes originaires de l'une des baies les plus célèbre du monde furent embarqués, direction la France. (voir rubrique livre "Rouge Brésil")
Grâce à des traducteurs s'étant imbibés de la culture de cette colonie sud-américaine, une conversation qui se révélera bigrement intéressante, put avoir lieu. Gonflé d’orgueil, le Roi leur demanda ce qu'ils avaient trouvé le plus admirable dans ce beau pays de France. Pas impressionnés une seconde, ils répondirent : " Nous trouvons fort étrange que tant de grands hommes, portant barbe, forts et armés, qui sont autour de vous (il est fort vraisemblable qu'ils voulaient parler des suisses de sa garde), se soumettent naturellement à obéir à un enfant, et qu'on devrait choisir plutôt quelqu'un d'entre eux pour commander ! " Cette pertinente réponse stupéfia Charles IX !
Puis les indigènes interrogèrent à leur tour : Comment se fait-t-il que tant d'hommes forts obéissent à un enfant ? Par quel étrange mystère se soumettent-ils sans rechigner ? Ne suffirait-il pas tout simplement que le peuple cesse d'obéir, pour que le Roi tombe ? Le Roi, devant cette proposition de désobéissance civique en resta totalement médusé !
Grâce à des traducteurs s'étant imbibés de la culture de cette colonie sud-américaine, une conversation qui se révélera bigrement intéressante, put avoir lieu. Gonflé d’orgueil, le Roi leur demanda ce qu'ils avaient trouvé le plus admirable dans ce beau pays de France. Pas impressionnés une seconde, ils répondirent : " Nous trouvons fort étrange que tant de grands hommes, portant barbe, forts et armés, qui sont autour de vous (il est fort vraisemblable qu'ils voulaient parler des suisses de sa garde), se soumettent naturellement à obéir à un enfant, et qu'on devrait choisir plutôt quelqu'un d'entre eux pour commander ! " Cette pertinente réponse stupéfia Charles IX !
Puis les indigènes interrogèrent à leur tour : Comment se fait-t-il que tant d'hommes forts obéissent à un enfant ? Par quel étrange mystère se soumettent-ils sans rechigner ? Ne suffirait-il pas tout simplement que le peuple cesse d'obéir, pour que le Roi tombe ? Le Roi, devant cette proposition de désobéissance civique en resta totalement médusé !
Mais l'histoire ne s'arrête pas là, un deuxième commentaire, non moins lucide allait achever notre jeune Roi : " Nous avons aperçu d'un côté ; pleins d'hommes gorgés de toutes sortes de richesses, alors que de l'autre côté ce ne sont que mendiants décharnés de faim et de pauvreté qui se pressent à leurs portes. Nous trouvons étrange que la moitié nécessiteuse souffre d'une telle injustice, et qu'elle ne prit les autres à la gorge, ou mette le feu à leur maison." Le Roi outré, vexé de tels propos, mit rapidement fin à l'entrevue, il venait en quelque sorte, de se faire " rhabiller pour l'hiver " par des gens qu'il qualifiait de "va-nu-pied", une outrecuidance qui en d'autres circonstances eut été punie de mort.
Assurément, ces peuplades dîtes " indigènes " sont très choquées par les différences abyssales de niveau de vie en France, pays qui se dit civilisé (Non non pas aujourd'hui, mais en 1562, comme quoi rien n'a fondamentalement changé). Chez eux, chaque habitant a sa place dans la société, personne n'est laissé pour compte, tout le monde participe au développement de la communauté. Mais alors, les sauvages sont-ils réellement ceux que l'on croit ?
De quel droit, nous européens, nous sommes nous arroger l'autorisation de s'ingérer, de soumettre, et de modifier les codes et l'ordonnancement de ce Nouveau Monde ? Du droit de notre supériorité morale ? Par souci de prosélytisme chrétien ?Ou plutôt du droit de notre force brute et de notre insatiable opportunisme mercantile !
Bien sûr, on pourra me rétorquer que ces peuplades indigènes se sont livrées à du cannibalisme, certes, je le conçois, mais s'ils sont sauvages ce n'est pas au sens de la cruauté gratuite, mais au sens de la nature, dans laquelle ils puisent toute leur ressource, leur énergie, leur croyance et leur destinée. Ils font partie intrinsèque de la nature, sans elle, leur civilisation disparaîtrait. S'ils mangent leur ennemi, ce n'est pas pour se nourrir, mais pour obéir à un code d'honneur et ainsi s'enrichir de la force de celui-ci.
Sommes-nous à ce point vertueux, qu'il soit acceptable de concevoir l'idée d'aller les convertir à nos vies ? Qu'ils seront nécessairement plus heureux en vivants comme nous ? Je vous laisse le soin de la réponse.
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